Ape : La Cedeao refuse la fuite en avant vers l’aventure
A la suite des ministres du Commerce qui avaient refusé de valider le compromis sur l’Ape lors du Comité ministériel de suivi (Cms) du 17 février 2014 à Dakar, les chefs d’Etat viennent à leur tour de suivre les arguments que la société civile a exprimés à maintes occasions. La société civile les encourage pour cet acte de responsabilité.
A l’issue de la Quarante-quatrième Session ordinaire de la Conférence des chefs d’Etat de la Cedeao tenue à Yamoussoukro les 28 et 29 mars 2014, les leaders de l’Afrique de l’Ouest ont reconnu « qu’il reste quelques questions techniques à résoudre » dans la négociation de l’Ape et ont instruit « les négociateurs en chef de prendre les mesures nécessaires, dans un délai de deux mois, en vue de trouver une solution aux questions soulevées par certains Etats membres, notamment le Nigeria, avant la signature de l’Accord. La Conférence instruit les Négociateurs en chef de mettre en place un Comité technique incluant des représentants du Nigeria, du Ghana, du Sénégal et de la Côte d’Ivoire, pour examiner ces questions et soumettre leurs conclusions aux Chefs d’Etat et de Gouvernement. »
La plateforme des organisations de la société civile de l’Afrique de l’Ouest sur l’Accord de Cotonou (Poscao), en partenariat avec de nombreuses organisations du secteur privé, des mouvements de jeunes, de femmes, etc., se félicite de cette décision courageuse et clairvoyante qui marque l’attachement des chefs d’Etat de la Cedeao à l’intégration économique régionale et à la protection des économies encore vulnérables de l’Afrique de l’Ouest. A la suite des ministres du Commerce qui avaient refusé de valider le compromis sur l’Ape lors du Comité ministériel de suivi (Cms) du 17 février 2014 à Dakar, les chefs d’Etat viennent à leur tour de suivre les arguments que la société civile a exprimés à maintes occasions. La société civile les encourage pour cet acte de responsabilité.
Les chefs d’Etat de la Cedeao ont refusé la fuite en avant vers l’aventure, car la conclusion de la négociation a été bâclée et d’importantes questions ont été traitées avec une légèreté et une précipitation que rien ne justifie. Les exigences illégitimes et dangereuses de l’Union européenne doivent être rejetées. Certaines questions techniques doivent faire l’objet d’une renégociation sérieuse car les concessions de l’Afrique de l’Ouest sont inappropriées et pourraient avoir des conséquences dramatiques sur l’économie régionale dans le futur.
Parmi ces questions, les plus préoccupantes sont : l’offre d’accès au marché, la Clause de la nation la plus favorisée (Npf), les taxes de l’exportation, les clauses de rendez-vous et le Paped.
Sur ce dernier point, la société civile attire l’attention des chefs d’Etat sur les contre-vérités avancées à propos du Paped par l’Ue et amplifiées par certains acteurs de la région. L’Union européenne laisse courir le bruit selon lequel elle fournira 6.5 milliards d’euros par tranches de 5 ans à trois reprises, ce qui ferait à l’arrivée près de 19 milliards d’euros en 15 ans. Ce qui, dit l’Ue, serait supérieur aux 15 milliards d’euros demandés par l’Afrique de l’Ouest, oubliant que ces 15 milliards exigés par l’Afrique de l’Ouest ne concernent que les 5 premières années.
L’Ue n’a jamais pris l’engagement de verser 19 milliards d’euros en 15 ans. Elle n’a jamais dit non plus qu’elle versera cet argent dans le Fonds régional Ape pour laisser à la Cedeao la liberté de financer les projets du Paped avec des procédures améliorées. Les promesses de financement du Paped, telles qu’elles se présentent, ne sont rien d’autre qu’une coquille vide. Que valent 6.5 milliards pour 16 pays représentant ensemble plus 300 millions d’habitants ? La société civile régionale refuse de lâcher la proie – le développement du marché régional -, pour l’ombre – une hypothétique aide européenne.
Les consultations qui seront menées au cours des deux mois à venir doivent rester transparentes et ouvertes à tous les acteurs, en particulier la société civile et le secteur privé, qui ont démontré leur parfaite maitrise de l’Ape, leur compréhension des enjeux de l’intégration régionale et leur engagement résolu et déterminé à s’opposer à toute menace intérieure ou extérieure.
Les organisations de la société réaffirment leur attachement indéfectible à l’intégration régionale et exhortent les Chefs d’Etat à poursuivre leurs efforts pour traduire en acte la volonté réaffirmée à Yamoussoukro de renforcer la stratégie industrielle régionale, d’harmoniser les politiques commerciales, de mettre en place un programme de transition fiscale, d’appliquer le schéma de libéralisation des échanges, de garantir la libre circulation des biens et des personnes en Afrique de l’Ouest et tenir leur engagement à réaliser l’Union monétaire en 2020.
Fait en Afrique de l’Ouest le 6 avril 2014
CE TEXTE VOUS A ETE PROPOSE PAR PAMBAZUKA NEWS
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** Plateforme des Organisations de la société civile de l’Afrique de l’Ouest sur l’Accord de Cotonou à l’issue de la 44e Conférence ordinaire de la Cedeao des 22-28 mars 2014 (pour plus d’informations sur la POSCAO, visiter : www.endacacid.org/poscao)
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