Centrafrique : Du temps des colonies à la Françafrique
Deux ans après l’attaque de la Libye, un an après la guerre au Mali, la France intervient de nouveau militairement en Centrafrique. Il est de notre devoir en tant qu’anticolonialistes et partisans de la solidarité internationale des peuples de nous opposer à l’opération Sangaris.
Nous exprimons toute notre solidarité avec le peuple centrafricain qui souffre, depuis plusieurs mois, d’inacceptables violences. On ne peut trouver aucune justification aux exactions commises par les groupes armés Séléka ou anti Balaka à l’encontre des populations civiles de Centrafrique qui sont terrorisées et condamnées à fuir. Ces actes sont inacceptables. Mais force est de constater que le débarquement des troupes françaises, bien loin de répondre à l’objectif humanitaire proclamé, a, même sur ce plan, contribué à aggraver la situation : loin de Bangui, sur la plus grande partie du territoire, les massacres continuent, et, dans la capitale même, le climat de violence perdure.
Les troupes françaises ne sont pas « neutres » et leur présence ne fait qu’alimenter la guerre civile. Et l’envoi de troupes de pays de l’Union européenne, réclamé par François Hollande, ne fait qu’impliquer l’Union dans cette intervention militaire. En tout état de cause, l’entrée en guerre de la France en Centrafrique, décidée par le président de la République française, ne saurait être considérée comme « normale » ainsi que tend à le faire croire la propagande du gouvernement et de l’armée :
- La France, ancienne puissance colonisatrice, n’a pas perdu l’habitude de considérer l’Afrique, d’abord comme une zone d’influence. Sa logique est toujours néo-coloniale, à l’ombre de l’impérialisme Us qui en tire également profit
- La guerre ne peut apporter la démocratie ; bien au contraire elle est lourde de risques d’enlisement et ne porte que la garantie d’une extension et de la pérennisation des conflits. Ceux qui en profitent, ce sont les marchands d’armes… et, de ce fait, la balance commerciale française en premier lieu.
- Une fois de plus, cette intervention se déroule dans un pays et une région où la France défend les intérêts occidentaux tout en servant d’abord ses propres intérêts stratégiques à travers ceux de ses grandes entreprises. Ce qui est en jeu, c’est notamment le contrôle des ressources minérales et énergétiques, en particulier les mines d’uranium nécessaires au complexe nucléaire civil et militaire, ainsi que les prospections de Total ou la logistique des transports fluviaux, portuaires ou par rails de Bolloré.
- La France, en agissant de la sorte, poursuit également un but politique à moyen et long-terme : fragiliser les États africains pour aboutir à des divisions nationales qui seront source d’affaiblissement des peuples se relevant à peine de la colonisation. La balkanisation de l’Afrique, la division et l’affaiblissement des résistances populaires africaines, est un objectif stratégique essentiel tant pour la France que pour toutes les puissantes concurrentes.
- La France s’appuie pour cette intervention sur les dictatures qu’elle soutient à bout de bras depuis des années (Tchad, Congo Brazzaville, Gabon, Cameroun…) et qu’elle conforte ainsi à nouveau, contre les peuples qui les contestent, comme on le voit aujourd’hui au Burkina et au Bénin. En réalité, de Bokassa à Djotodia, en passant par Bozizé, la France a assuré sa domination sur la Centrafrique en y installant et en y soutenant une kyrielle de dictateurs corrompus,… quitte à les jeter quand la coupe était trop pleine. Elle est intervenue militairement sept fois dans ce pays qui illustre jusqu’à la caricature la nature de la Françafrique, sur ses trois piliers (politique, militaire, économique).
En poursuivant cette politique de la canonnière et contraire aux besoins des peuples d’Afrique la France a également contribué à la déstabilisation de toute la région. Il suffit de tourner ses regards vers le Tchad, la Rdc, le Soudan du ou le Rwanda pour s’en rendre compte. De même que le développement de ces pays passe par la délivrance du carcan du franc Cfa, de même, une solution politique passe nécessairement par le retrait des troupes françaises.
Au moment où le gouvernement (français) présente sa loi sur le développement, qui concerne 16 pays africains toujours soumis à sa domination néo-coloniale, dont la Centrafrique et le Mali, nous appelons à un rassemblement le 10 février à l’Assemblée nationale contre les interventions militaires à répétition, contre la continuité de la politique françafricaine de la France, pour la fermeture des bases militaires françaises en Afrique. C’est au peuple de Centrafrique qu’il revient de dessiner le futur de leur pays. L’avenir de l’Afrique est l’affaire des peuples d’Afrique.
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