Le nouveau panafricanisme et les conflits actuels dans la région Afrique

L’ouvrage “Sustaining the new wave of parafricanism” est d’une grande richesse et permet de comprendre des situations complexes comme celle du Soudan et de la Mauritanie. Elle invite à la réflexion et à l’action pour un nouveau souffle du panafricanisme.

Nous avons participé du 31 octobre au 3 novembre 2011, á Mono, au Mali, á l’édition 2011, du Forum des peuples á l’initiative de la Coalition des alternatives africaines Dette et Développement (CAD).
Nous avons fait une contribution au symposium sur ‘’ le droit á la souveraineté sur les ressources naturelles et richesses : conditions préalables aux droits á la vie pour tous et du vivre ensemble.’’

En conclusion nous avons affirmé :
- le droit des peuples à jouir des richesses de leur terroir ;
- la justesse du combat pour le respect des droits anciens et nouveaux (politiques,
socioéconomiques, culturels) ;
- la nécessité d’une solidarité active entre les mouvements sociaux ;
- la nécessité du renforcement des capacités des organisations populaires ;
- l’enjeu des échanges d’informations et d’expertises ;
- l’enjeu d’une éducation permanente.

(…) Beaucoup d’informations et d’analyses furent livrées sur le printemps arabe de 2011, sur les relations entre la Libye et le Mali, etc. C’est dans ce cadre que nous avons reçu de notre collègue Bankié Forster un ouvrage intitulé “Sustaining the new wave of parafricanism” (soutenir la nouvelle vague du panafricanisme).

SUR LES AUTEURS ET LE CONTENU

Bankié est un activiste africain d’origine ghanéenne et gambienne et vivant actuellement en Namibie où il travaille dans le cadre du Conseil National pour la Jeunesse. Il a coédité avec Viola C. Zimunya l’ouvrage dont il s’agit. Cet ouvrage est une édition des actes de l’atelier qui s’est tenu à l’université de Windhoek (Namibie) du 6 au 9 décembre 2010, avec le soutien du Haut Commissariat du Nigéria en Namibie.

Dans la préface, Ibrahima Abou Sall de Mauritanie annonce la couleur et indique l’originalité de l’atelier qui a regroupé des intellectuels adultes et jeunes d’Afrique au Sud du Sahara et d’Afrique Australe qui ont vécu le colonialisme et la lutte contre le racisme.

• La section I de l’ouvrage est constituée des interventions à la cérémonie d’ouverture de l’atelier de Windhoek :

- Mandela Kapere, directeur exécutif du Conseil National de la Jeunesse de Namibie
- HE. Prince Adegboyega C. Ariyo du Haut Commissariat du Nigéria
- Maureen Hinda du Centre Panafricain de Namibie (Pacon)
- Dr Tony Onwuemah du Centre for Black and African Arts and Civilizations (CBAAC)
- Tendai Wenyika de la Ligue Panafricaine de la Jeunesse (PAYU)
- Bience Gawanas, commissaire aux Affaires Sociales de l’Union Africaine
- Sam Nujoma, ancien président de la République.
A ces interventions il faut ajouter un panel sur le Sahel.

• La section II est constituée de contributions namibiennes sur le panafricanisme (Peter H. Katjavivi, Mburumba Kerina, Zed Ngavirue, Paul Heimut, Job Shipululo Amupanda).

• La section III accueille les arguments philosophiques avec des contributions d’Adegboyega, Almaz Haile Nsajigwa Isubha-Gwamaka Chinwezu et Mongane Wally Seroté.

• La section IV donne des points de vue structurés au niveau des zones de contact afro-arabes, avec insistance particulière sur le Soudan et la Mauritanie (Samba Diallo, Sabir Ibrahim, John Nyuot Yoh, Paternus Cléophace Niyeriga, Hagir Sayed Mohamed, Bankie F., Cecil Gutzmore.

• La section V ouvre le chapitre de la diaspora et des relations extérieures avec les autres civilisations et les autres puissances dont la Chine (Paul Tu Hafeni Shipale, Morgan Moss, Adegboyega, C. Aryo Mbingeneeko H., et Andile Lungisa)

• La section VI revient sur l’histoire des congrès panafricains de 1900 à 1977 (Bankié, Sibanda, Onwumah)

• La section VII est constituée des rapports d’ateliers spécifiques (sur l’éducation par exemple), de la déclaration finale, du rapport général et de la liste des participants.

Cette publication est d’une grande richesse et permet de comprendre des situations complexes comme celle du Soudan et de la Mauritanie. Elle invite à la réflexion et à l’action pour un nouveau souffle du panafricanisme. L’occasion a été donnée de revenir sur la première vague du panafricanisme. Dans l’allocution d’ouverture, le président Sam Nujoma a rappelé la contribution, dés le début du XXe siècle, des militants de la diaspora comme Sylvester Williams, Georges Padmore, Dubois et du continent comme Nasser, Ben Bella, Sékou Touré, Modibo Keita, J. Nyerere, P. Lumumba, K. Kaunda, Amilcar Cabral, Agostino Neto, Samora Machel, avec une mention particulière á K Nkrumah. Il a su souligner le rôle capital du Comité de libération de l’OUA et l’efficacité de la solidarité inter africaine.

Dans le cadre du panel sur le Sahel des échanges éclairants ont été apportés sur l’ethnogenèse et l’histoire ancienne, moderne, et contemporaine de l’Afrique, sur les jeux des facteurs internes et externes (influence des religions monothéistes, des colonisations) dans la configuration et la nomenclature actuelle (toponymes, ethnonymes).

Dans la section philosophique les différentes conceptions du panafricanisme ont été revisitées avec leurs soubassements idéologiques, culturels, politiques, économiques, sécuritaires, militaires et sanitaires (Léopold Sédar Senghor, Cheikh Anta Diop, Nyerere, H. Boigny, Steve Biko). Chinwezu semble épouser les thèses de C. Anta Diop en les réactualisant, en les recontextualisant et en invitant á s’inspirer de l’histoire africaine et de celle des autres peuples.

‘’ The great challenge facing African thinkers, wheter or not they are also political leaders, is to fashion an industrial communalist ideology to guide the political economy of an industrialized Black superpower. In this task pre-colonial African countries like Asante and Zulu; and also from non-african countries like modern Japon, Sweden, Cuba and China” (op.cit p83).

La faiblesse des leaderships civils et le rôle catastrophique des militaires ont été soulignés aussi bien en Mauritanie qu’au Soudan ( cf Samba Diallo op cit p 107). La tragédie africaine fortement liée á la colonisation et á la recolonisation venant de l’occident principalement a été soulignée par Chiwensu (op cit p74) Des projections ont été esquissées, des recommandations formulées pour la gestion des phases post conflits. Ainsi, pour le Soudan, on peut dire la même chose pour la Mauritanie, il convient d’approfondir la question de l’identité culturelle, de la diversité culturelle, du respect des différences. Ainsi s’exprime Hagir Sayed Mohamad : « whether Sudan separates or remains intact, it is considerable need to find its identity and live it. If Sudan separates, the South would fall under the hands of Sudanese aware of their identity, but the Nord will suffer loss of identity -the influence of Arab-Islamic culture could create a new focus for terrorism. If Sudan remains united there will be a need to deepen the sens of identity. Respect for the other’s difference is the main base for the new Sudan and for a new period of growth and development ( op cit P 172).

Les préoccupations, les attentes de la diaspora ne sauraient être occultées. Ainsi, Paul Tuhafebi Shipale trouve que les revendications pour les réparations sont toujours d’actualité. « What ‘’advancing the new ware of the reparation movement’’ means is that African people have not lost their memory of the historical atrocities inflicted on us, and that we will never forget what has happened to us, and the vestiges of slavery continue today. The demand for through serious organizing and activism no matter how many white and Black people are opposed to it. Contrary to what some people think, we must never forget what happened to us and how it continues to impact us today (op cit p 199).

Cet ouvrage mérite donc d’être diffusé largement et d’être discuté de manière approfondie. Les recommandations qu’on peut en tirer peuvent aider á mieux tracer les voies d’un nouveau panafricanisme fait de courage, de lucidité, d’ouverture, de pragmatisme et d’optimisme.

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** Babacar Diop Buuba est professeur titulaire à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar où il enseigne depuis 1981 l’histoire des civilisations anciennes.

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