Le socialisme bolivarien du XXIe siècle

La chute du Mur de Berlin, la disparition de l’Union soviétique et la restauration d’un capitalisme particulier en Chine ont conféré une charge négative au socialisme et suscité le découragement chez beaucoup de militants de la gauche. Cependant, le président Chavez, par sa perspicacité, a compris que la victoire du socialisme de type nouveau passe nécessairement par la prise en compte aussi bien des conditions particulières de chaque pays que des métamorphoses de l’impérialisme. Le socialisme bolivarien du XXIe connaît des succès. Il lui reste à parcourir un chemin long et ardu, parsemé d’obstacles.

Après l’écroulement du mur de Berlin en 1989, la dislocation de l’Union soviétique et des autres pays se réclamant du socialisme, les idéologues du capitalisme ont proclamé la mort définitive du socialisme. Du monde se réclamant du socialisme ne restait à l’époque que Cuba, situé à quelques kilomètres seulement des côtes des Etats-Unis d’Amérique devenus l’unique puissance mondiale. La résistance héroïque du peuple cubain, en dépit des souffrances endurées, constitue un miracle, c’est-à-dire une belle chose suscitant l’admiration. Elle constitue un exemple éloquent en Amérique latine et le premier chapitre du socialisme du XXIe siècle que le président Chavez a théorisé et mis en pratique. Ce socialisme se présente d’une part comme une continuation du socialisme élaboré par Karl Marx et enrichi par ses successeurs, Lénine et Mao Zedong en particulier et, d’autre part, comme une rupture avec ce même socialisme sous ses formes perverties. C’est ce socialisme que nous allons présenter.

LE SOCIALISME DU XX SIECLE

Marx avait prévu la transition au socialisme dans un pays capitaliste développé. Dans ce pays, la contradiction entre les forces productives et les rapports sociaux de production arrivée à maturité est résolue par une révolution dirigée par le prolétariat, qui, en tant que classe la plus exploitée et la plus aliénée, prend le pouvoir et instaure la dictature du prolétariat, période de transition menant au communisme.

Le socialisme est caractérisé par les traits suivants :

- la prise de possession des moyens de production par la société qui doit entraîner l’élimination de la production marchande et la fin de la domination du produit sur le producteur,

- l’organisation méthodique consciente de la production sociale,

- « la possibilité d’assurer, au moyen de la production sociale, à tous les membres de la société, une existence non seulement parfaitement suffisante au point de vue matériel et s’enrichissant de jour en jour, mais leur garantissant aussi l’épanouissement et l’exercice libres et complets de leurs dispositions physiques et intellectuelles». ( F. Engels , Socialisme utopique et socialisme scientifique , Editions Sociales , Paris , 1977 , P.185.)

La révolution première prolétarienne victorieuse a eu lieu en Russie, pays capitaliste arriéré à l’époque de l’impérialisme dont les traits caractéristiques sont les suivants selon Lénine :

- « concentration de la production et du capital parvenue à un degré de développement si élevé qu’elle a créé les monopoles dont le rôle est décisif dans la vie économique ;

- fusion du capital bancaire et du capital industriel, et création, sur la base de ce « capital financier », d’une oligarchie financière ;

- exportation des capitaux, à la différence de l’exportation des marchandises, qui prend une importance particulière ;

- formation d’unions internationales monopolistes se partageant le monde ;

- fin du partage territorial du globe entre les puissances capitalistes. » (Lénine Œuvres complètes, tome 22, P. 205.)

Le développement inégal du capitalisme devenu impérialisme a rendu possible la révolution dans le maillon le plus faible du système impérialiste. Cette révolution a ouvert la voie à l’édification du socialisme. La Russie de 1917 était dans une situation paradoxale, caractérisée à la fois par son retard de plusieurs années sur le monde de l’impérialisme et par son avance sur celui-ci. Les contradictions issues de cette situation exceptionnelle avaient créé les conditions propices à l’éclatement de la révolution qui a connu deux étapes : la révolution bourgeoise et la révolution prolétarienne.

La deuxième grande révolution dirigée, par Mao Zedong a eu lieu dans un pays semi-féodal et semi-colonial, la Chine. Mao a montré que la victoire de cette révolution, dirigée par la classe ouvrière alliée à la paysannerie et à d’autres forces progressistes, ne pouvait pas déboucher sur l’instauration immédiate d’un régime socialiste, mais sur la démocratie nouvelle, phase de transition durant laquelle sont créées les conditions nécessaires à l’édification du socialisme.

Les transitions socialistes du XXe siècle ont connu des succès. En suivant la voie socialiste, l’Union soviétique et la Chine se sont hissées en un temps record au rang de puissances mondiales, en dépit des manœuvres des puissances impérialistes pour tuer dans l’œuf leurs révolutions. En dépit de ces succès, l’Union soviétique a implosé et la Chine s’est engagée dans une voie capitaliste particulière.

Les idéologues du néolibéralisme ont alors vite fait de proclamer la faillite du socialisme, en faisant fi des inquiétudes sur la transition socialiste en Union soviétique exprimées par Lénine à la fin de sa vie et des avertissements de Mao sur la possibilité d’une restauration du capitalisme en Chine.

Dressant en 1921 le bilan de la révolution prolétarienne, Lénine a montré qu’il se réduisait à trois points :
- « sortie de la guerre impérialiste mondiale ; dénonciation et mise en échec de la boucherie organisée par les deux groupes de rapaces capitalistes du monde (…)
- création du régime des soviets, forme de réalisation de la dictature du prolétariat (…)

- constructions des bases économiques du régime socialiste. Dans ce domaine, le principal, l’essentiel n’est pas achevé (Lénine, Œuvres complètes, tome 33, pp. 107-108)

Dans une lettre adressée à Molotov le 26 mars 1922, Lénine a insisté sur la fragilité du Parti : « (…) Notre parti est aujourd’hui moins éduqué politiquement en général et en moyenne (si l’on prend le niveau de l’immense majorité de ses membres) qu’il ne le faudrait pour une direction effectivement prolétarienne à un moment aussi difficile… » (Lénine, Ibidem. pp. 259-260)

Sur la politique de ce parti, Lénine a fait la constatation suivante : (…) actuellement, la politique prolétarienne du parti est déterminée non par ses effectifs, mais par l’autorité immense et sans partage de cette couche très mince que l’on peut appeler la vieille garde du parti. » (Lénine, Ibidem., p.260)

La cohésion de ce Parti était une préoccupation pour Lénine: « …Le point essentiel dans le problème de la cohésion, c’est l’existence de membres du Comité central tels que Staline et Trotsky. Les rapports entre eux constituent à mon sens le principal danger de cette scission qui pouvait être évitée, ce à quoi devrait servir, à mon avis, un accroissement de l’effectif du Comité central, porté à 50 ou 100 personnes.» (Lénine, Œuvres complètes, tome 36, p.606.)

L’inquiétude de Lénine était fondée sur les défauts des deux dirigeants qu’il a exposés dans sa lettre au Congrès en date 24 décembre 1922 : « Le camarade Staline, devenu secrétaire général, a concentré entre ses mains un pouvoir illimité, et je ne suis pas sûr qu’il puisse toujours s’en servir avec assez de circonspection. » (Lénine, Ibidem. p .6O7.)

Dans le complément à sa lettre du 24 décembre 1922, Lénine est revenu sur le caractère de Staline : « Staline est trop brutal, et ce défaut parfaitement tolérable dans notre milieu et dans les relations entre nous, ne l’est plus dans les fonctions de secrétaire général. Je propose donc aux camarades d’étudier un moyen pour démettre Staline de ce poste et pour nommer à sa place une autre personne qui n’aurait en toutes choses sur le camarade Staline qu’un seul avantage, celui d’être plus tolérant, plus loyal, plus poli et plus attentif envers les camarades, d’humeur moins capricieuse, etc. Ces traits peuvent sembler n’être qu’un infime détail, mais, à mon sens, pour nous préserver de la scission et en tenant compte de ce que j’ai écrit plus haut sur les rapports de Staline et de Trotsky, ce n’est pas un détail, ou bien c’en est un qui peut prendre une importance décisive.» (Lénine, Ibidem. p. 608.)

Quant à Trotsky, Lénine reconnaît ses « capacités éminentes » et un défaut : «Il est peut-être l’homme le plus capable de l’actuel Comité central, mais il pêche par excès d’assurance, et par un engouement exagéré pour le côté purement administratif des choses. » (Lénine, Ibidem. p. 607.)

De l’analyse des traits de caractère de Staline et de Trotsky, Lénine a tiré la conclusion suivante : «Ces deux qualités de deux chefs éminents du Comité central seraient capables d’amener incidemment la division et, si notre Parti ne prend pas les mesures nécessaires pour s’y opposer, la scission peut se faire sans qu’on s’y attende.» Lénine, (Ibidem. p. 607)

A l’analyse des traits de caractère de la vieille garde du parti par Lénine, fait suite celle de la jeune garde représentée par Boukharine et Piatakov. Ces deux, bien qu’étant « les compétences les plus marquantes (parmi les plus jeunes), ont des insuffisances. Boukharine n’est pas seulement dans le parti un théoricien des plus marquants et de très haute valeur ; il jouit à bon droit de l’affection du Parti tout entier. Cependant ses vues théoriques ne peuvent qu’avec la plus grande réserve être tenues pour parfaitement marxistes, car il y a en lui quelque chose de scolastique (il n’a jamais étudié et, je le présume, n’a jamais compris entièrement la dialectique. » (Lénine, Ibidem. p.607)

Lénine a fait de Piatakov la présentation suivante : « Ensuite, Piatakov, doué sans aucun doute d’une grande volonté et de capacités éminentes, se laisse cependant trop entraîner par le côté administratif des choses pour qu’on puisse s’en remettre à lui quand il s’agit d’une question politique sérieuse. » (Lénine, Ibid. pp. 607 – 608).

En 1923, un an avant sa mort, Lénine a constaté que l’appareil d’Etat soviétique n’était pas prolétarien en dépit de son appellation : «Le plus nuisible serait de croire (…) que nous possédons un nombre plus ou moins considérable d’éléments pour édifier un appareil vraiment neuf, et qui mérite véritablement le nom d’appareil socialiste, soviétique, etc. Non cet appareil, nous ne l’avons pas pour ainsi dire et même possédons peu d’éléments qui permettent de le créer. Et nous ne devons pas oublier que pour le mettre en place, il ne faut pas ménager son temps, et cela prendra beaucoup d’années. » (Lénine, Ibidem. p.502.)

Les types de rapports sociaux existant dans la Russie de l’époque étaient loin d’être homogènes. Lénine les a décrits ainsi :

- « L’économie patriarcale, c’est-à-dire, dans une très grande mesure, l’économie naturelle, paysanne ; la petite production marchande (cette rubrique comprend la plupart des paysans qui vendent du blé) ; le capitalisme privé ; le capitalisme d’Etat ; le socialisme. » (Lénine, Œuvres complètes, tome 27, pp. 350 - 351.)

La domination de la petite production caractérisait ces types économiques. Cette domination explique la contradiction contenue dans l’expression « républiques socialistes des soviets », expression qui « traduit la volonté du pouvoir des soviets d’assurer la transition vers le socialisme, mais n’entend nullement signifier que le nouvel ordre soit socialiste. » (Lénine, Ibidem. p.350)

En révolutionnaire lucide, Lénine, plus que tout autre, avait pris conscience du large fossé existant entre la volonté de construire une société socialiste et la réalité matérialisant cette volonté .Ses successeurs à qui il a laissé la tâche de parachever son œuvre n’ont eu ni son intelligence ni sa clairvoyance dans une situation plus compliquée. C’est pourquoi ils n’ont su ni parachever correctement son œuvre, ni maîtriser les nouvelles conditions ayant prévalu après sa mort.

Dans « De la juste solution des contradictions au sein du peuple », texte daté du 27 février 1957, c’est-à-dire un an après le XXe congrès du Parti communiste de l’Union soviétique qui a vu le triomphe de la ligne révisionniste de Khrouchtchev, Mao a averti le Parti communiste chinois sur la possibilité de restaurer le capitalisme en Chine. « Certes en Chine, la transformation socialiste, en tant qu’elle concerne la propriété, est pratiquement achevée ; les vastes et tempétueuses luttes de classe, menées par les masses en période révolutionnaire sont pour l’essentiel terminées. Néanmoins, il subsiste des vestiges des classes renversées, des propriétaires fonciers et des compradores, la bourgeoisie existe encore, et la transformation de la petite bourgeoisie ne fait que commencer. La lutte de classes n’est nullement arrivée à son terme. La lutte de classes entre le prolétariat et la bourgeoisie, entre les différentes forces politiques, entre les idéologies prolétarienne et bourgeoise sera longue et sujette à des vicissitudes, et par moment elle pourra même devenir très aigüe. Le prolétariat cherche à transformer le monde selon sa propre conception du monde, et la bourgeoisie, selon la sienne. A cet égard, la question de savoir qui l’emportera, du socialisme ou du capitalisme, n’est pas encore véritablement résolue. » (Mao Zedong, « De la juste solution des contradictions au sein du peuple. » In Œuvres choisies, tome V, E.L.E, Pékin, 1977, p.444.)

Les inquiétudes exprimées par Lénine à la veille de sa mort et les avertissements de Mao au Parti communiste chinois montrent que si la transition est le mouvement qui consiste à aller au-delà d’une situation, ce mouvement est tributaire de plusieurs facteurs. Il n’est ni automatique ni linéaire. Il peut connaître des piétinements, des bifurcations, des régressions, un échec. La transition au socialisme s’étend sur une longue période. Il est bon de rappeler que la transition du féodalisme au capitalisme a duré des siècles. Un échec dans la transition au socialisme ne signifie pas que le socialisme est irréalisable. C’est ce qu’a compris le président Chavez pour qui, il faut analyser les causes des échecs et avancer.

LE SOCIALISME BOLIVARIEN DU XXIE SIECLE

Hugo Chavez n’a pas succombé au découragement engendré par la chute du mur de Berlin et la dislocation des pays se réclamant du socialisme. Il a compris que si le socialisme est le seul système permettant d’éradiquer les maux dont souffre l’humanité, son édification doit tenir compte des particularités de chaque pays et de la forme revêtue par le capitalisme dans sa nouvelle phase impérialiste.

C’est le sociologue chilien Thomas Moulian qui a employé en 2000 le terme « socialisme du XXIe siècle » dans son livre El socialismo del siglo XXI. La quinta via. Ce terme a été repris par Hugo Chavez lors du Forum social mondial de Porto Allègre en janvier 2005 et du IVe Sommet pour l’annulation de la dette sociale, où il a affirmé que pour trouver une alternative au capitalisme il fallait « inventer le socialisme du XXIe siècle. ». « Nous devons revendiquer le socialisme comme une thèse, un projet, un chemin, mais un nouveau type de socialisme, un socialisme humaniste qui place avant tout les hommes et non les machines ».

La chute du Mur de Berlin, la disparition de l’Union soviétique et la restauration d’un capitalisme particulier en Chine ont conféré une charge négative au socialisme et suscité le découragement chez beaucoup de militants de la gauche. Cependant, loin de se décourager, le président Chavez, par sa perspicacité, a compris que la victoire du socialisme de type nouveau passe nécessairement par la prise en compte aussi bien des conditions particulières de chaque pays que des métamorphoses de l’impérialisme.

Le Venezuela est un pays intégré par la force dans le système capitaliste mondial. Au début du XIXe siècle, il constituait la périphérie avancée de l’Empire espagnol et le berceau du mouvement de libération anticolonial le plus important en Amérique du sud. Les effets néfastes de la politique coloniale espagnole avaient poussé un segment de l’élite créole, dirigé d’abord par un intellectuel anglophile Francisco de Miranda et ensuite par Simon Bolivar, un visionnaire et un homme d’action, à lutter pour l’indépendance obtenue en 1811.

La mort de Bolivar a coïncidé avec la dislocation de l’union en au moins trois républiques (Colombie, Venezuela, et Equateur). L’économie du Venezuela était caractérisée par une agriculture arriérée dominée par le café et le cacao dans les régions côtières et par l’élevage dans les vastes plaines de l’intérieur du pays. La découverte et l’exploitation du pétrole au début du XXe siècle ont donné naissance à une classe moyenne et à une classe ouvrière autour des champs de pétrole de Maracaibo et des villes côtières. Le pays devint dépendant de la rente pétrolière. Il a connu une forte immigration européenne issue principalement de l’Italie, du Portugal et de l’Espagne.

L’histoire politique du Venezuela est caractérisée par des soulèvements dans lesquels des militaires progressistes ont joué un rôle déterminant. Chavez fait partie de ces militaires. Les effets néfastes de la politique d’ajustement structurel préconisée par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international ont créé les conditions qui ont porté au pouvoir Chavez et lui ont permis de déclencher le processus révolutionnaire au terme de l’adoption d’une nouvelle constitution donnant le pouvoir au peuple et créant les instruments permettant à ce peuple d’exercer le pouvoir.

Chavez est né le 28 juillet 1954. Il a intégré l’armée pour bénéficier d’une ascension sociale et professionnelle. Il s’est très tôt identifié aux pauvres, aux opprimés et aux idées progressistes. Sa pensée est fortement enracinée dans la tradition révolutionnaire nationaliste de l’Amérique latine. Il a évalué la pensée critique latino-américaine du XXe siècle, celle de Jose Carlos Mariatigui du Pérou, marxiste antidogmatique, de Fidel Castro Ruiz , leader de la révolution cubaine, de Che Guevara qui s’est démarqué très tôt de la construction du socialisme en Union soviétique comme le montrent son texte, «Le socialisme et l’homme à Cuba» (in Œuvres III :Textes politiques, Editions Maspéro, Paris 1971) et « Notes critiques d’ économie politique » (Mille et une Nuits, Paris, 2012), qui sont des annotations sur le « Manuel d’économie politique de l’Académie des Sciences de l’Urss », paru en 1954, d’Augusto Cesar Sandino du Nicaragua et de Farabundo Marti du Salvador. Il a intégré les apports de Simon Bolivar, d’Antonio Sucre, de Jose Gervasio Artigas et de Jose Marti, d’Ezquiel Zamora, ennemi juré de l’oligarchie terrienne. L’indépendance nationale, la souveraineté du peuple, la justice sociale, l’aversion pour la corruption et l’union latino-américaine sont les idées principales de Chavez.

ASPECTS THEORIQUES DU SOCIALISME BOLIVARIEN

- Le refus d’un modèle de socialisme valable pour tous les pays. Le socialisme n’est ni hors du temps, ni hors de l’espace. Il doit tenir compte des particularités de l’époque, des particularités culturelles du pays dans lequel il se construit. Le socialisme ne tombe pas du ciel selon Michael Leibowitz.

- Le point de départ du socialisme du XXIe siècle est l’être social et non l’individu mu par ses intérêts égoïstes.

- Son point d’arrivée est le développement de l’être humain. Ce développement ne doit pas être l’œuvre d’une avant-garde, mais le produit de l’action des masses populaires qui, en transformant la nature, se transforment en même temps.

- L’aversion pour le bureaucratisme qui détruit la réflexion et la créativité des masses.

- La lutte contre le dogmatisme qui se manifeste sur le plan théorique par des idées abstraites détachées de la vie, non soumises au questionnement et considérées comme la vérité absolue. Sur le plan politique, le dogmatisme réside dans le fait de vouloir résoudre des problèmes concrets en recourant à des recettes valables en tout temps et en tout lieu. Le dogmatisme paralyse la pensée et conduit l’action à une impasse.

- La mobilisation du peuple pour impulser des changements profonds dans la structure politique, économique, sociale du pays, pour refonder la République sur la justice sociale et pour combattre les deux grands maux que sont l’exclusion, la corruption morale.

- La démocratie participative suppose la participation directe à la gestion publique, la promotion d’instances de participation sociale et politique, la radicalisation du contrôle social, l’interpellation directe du gouvernement par le peuple, une politique souveraine, l’autodétermination des peuples, la participation de l’armée au développement du pays.

- La mise en place d’une nouvelle économie reposant sur la propriété sociale des moyens de production, la production sociale organisée par les travailleurs et visant la satisfaction de leurs besoins fondamentaux.
- Une politique d’intégration régionale par la création d’un ensemble de pays capable de combattre efficacement l’impérialisme et de créer des économies au service exclusif des peuples.

ASPECTS PRATIQUES DU SOCIALISME BOLIVARIEN

L’application des principes du socialisme du bolivarien a permis au Venezuela de faire des progrès notables dans les domaines de l’éducation, de la santé, de la culture, de l’habitat, etc.

Ces progrès n’ont été possibles que grâce à la création de différentes missions. L’objectif des ces missions créées en 2003 est de consolider la révolution bolivarienne dans les domaines politique, social, économique et culturel pour construire une société véritablement libre et démocratique .Les missions rendent effectifs les droits du peuple vénézuélien figurant dans la Constitution.

LE DROIT A L’EDUCATION ET AU SAVOIR

Pour matérialiser ce droit, trois missions sont créées :

La Mission Robinson comportant deux phases : la phase 1 lancée en Juin 2003 pour éradiquer l’analphabétisme. L’Unesco reconnait qu’en 2005, le Venezuela a éradiqué l’analphabétisme. La phase 2 donne aux personnes alphabétisées les moyens d’accéder à l’éducation primaire.

La Mission Ribas permet l’accès à l’éducation secondaire.

La Mission Sucre permet l’accès à l’enseignement supérieur.

LE DROIT A LA SANTE ET A LA VIE

La Mission Barrio Adentro est un programme de santé s’occupant de la médecine préventive et de la médecine curative.

LE DROIT A LA NOURRITURE ET A LA SECURITE ALIMENTAIRE

Deux missions sont chargées de la matérialisation de ce droit. Il s’agit de la Mission Mercal qui combat la faim par la commercialisation et la vente directe d’aliments de base à des prix subventionnés.

La Mission Zamora s’occupe de la redistribution des terres, de la fourniture de machines et d’intrants pour la production agricole.

LE DROIT AU LOGEMENT

La Mission Habitat s’occupe des logements, en tant que cadre humain de socialisation. Il fournit aux populations les ressources et le matériel nécessaires à la construction de logements sociaux.

LA POLITIQUE D’INTEGRATION REGIONALE

Conscient du fait que la transition au socialisme dans un monde globalisé dominé par les Etats-Unis d’Amérique n’a pas beaucoup de chance de réussir dans le cadre d’un seul pays, Chavez a contribué à la création d’institutions régionales favorisant la création d’économies au service exclusif des peuples.

Il s’agit d’abord de l’Alliance bolivarienne pour les Amériques (Alba) comme alternative à la zone de libre échange des Amériques (Alca). Cette alliance œuvre pour la création d’une économie non fondée sur le libre échange, mais sur l’intégration planifiée en vue de renforcer l’autonomie de l’Amérique Latine par rapport aux Etats-Unis d’Amérique.

Pour mettre fin au monopole de l’information détenu par les classes dirigeantes de l’Occident, le Venezuela a beaucoup œuvré pour la création de Telesur.

Par ses dimensions théorique et pratique, le socialisme bolivarien du XXIe a un double mérite. Le premier consiste à ouvrir de nouvelles pistes de réflexion à l’époque de l’impérialisme qui a pris une nouvelle forme et s’est doté de moyens raffinés pour perpétuer la domination et l’exploitation des peuples. Le deuxième montre qu’il est possible de recouvrer la capacité de rêver et engage à rêver, dans un contexte débarrassé des figures de grands guides du siècle dernier, dont l’image et la pensée ont plus paralysé nos « intellectuels» qu’elles ne les ont poussés à la critique, malgré leurs enseignements.

Le socialisme bolivarien du XXIe connaît des succès. Il lui reste à parcourir un chemin long et ardu, parsemé d’obstacles. Chavez a surmonté certains d’entre eux, tout en étant conscient des dangers qui guettent la révolution bolivarienne. Puissent ses successeurs continuer son œuvre révolutionnaire.

Pour nous Africains, qui continuons de voir se renforcer la domination et l’exploitation des nos pays par les différentes puissances impérialistes, le socialisme bolivarien du XXe siècle doit nous inspirer. Mais nous devons savoir que s’inspirer ne veut pas dire copier. Seule une telle posture , nous permet de divorcer d’avec l’attitude qui nous a caractérisés en face de l’Union soviétique et de la Chine, attitude faite d’une admiration béate qui nous a mis dans une situation semblable à celle des philosophes allemands du XIXe chez qui le développement historique de leur pays par rapport à l’Angleterre et à la France a engendré un surdéveloppement théorique qui les a poussés à réfléchir sur ce que les autres ont fait , au lieu de penser leurs réalités avec leurs têtes.

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** Thierno Diop est enseignant au Centre d’Etudes des Sciences et Techniques de l’Information (Cest) – Université Cheikh Anta Diop de Dakar.

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Bibliographie
- Engels, Friedrich, Socialisme utopique et socialisme scientifique, classiques du marxisme, édition bilingue, Editions sociales, Paris, 1977.
- Jorge A .Giordani C. La transicion venezolana al socialismo ,Valdes Hermanos Editores , Caracas , 2009 .
- Harnecker, Marta, América Latina y el socialismo del siglo XXI. Inventando para no errar, Secretaria de la Paz de la Presidencia de la Republica de Guatemala. Primera edicion : 2O1O.
- Lebowitz , Michael , El socialismo no cae del cielo: un nuevo comienzo , Monte Avila Editores , Caracas , 2007 .
- Lénine, Œuvres complètes, tomes 22, 27, 33, 36.
- Mao Zedong, Œuvres choisies, Tome V, Editions en langues étrangères, Pékin,
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- Raby, Diana, Democracia y revolucion : América Latina y el socialismo, Monte Avila Editores CA, Caracas, 2008.
- Las Misiones bolivarianas, Coleccion Terras de hoy, Caracas, 2006.
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