Mandela, un modèle qui dérange les dirigeants africains
Le parcours de Nelson Mandela est exemplaire. Enfermé pendant vingt-sept ans entre quatre murs, il en est sorti pour devenir président de la République d’un des plus puissants pays africains. Ne restant au pouvoir que pour un seul mandat, il a renoncé à sa charge. L’exemple est fort, pour l’ancienne comme pour la nouvelle génération de dirigeants africains. Son prestige lui permettait de s’accrocher au pouvoir, mais il a sans doute compris qu’on ne peut pas faire son époque et vouloir régenter la génération de ses fils. Mieux, il est rare de voir un homme quitter ainsi le pouvoir et le laisser entre d’autres mains sans que cela ne crée des heurts pour son pays.
Malheureusement, Nelson Mandela est un exemple qu’on oublie d’évoquer dans les instances où l’on parle d’unité africaine. Ce n’est pas étonnant. Car ce qu’il représente ne peut s’illustrer dans le syndicat de chefs d’Etats qu’est l’Union africaine. Ceux qui nous gouvernent ne défendent que leurs intérêts, pas ceux de leurs peuples.
Mandela est un modèle de démocrate gênant pour des dirigeants africains accrochés au pouvoir, dans une Afrique où le temps des élections est révolu ; on n’assiste qu’à des farces électorales. On s’autoproclame élu parce qu’on peut frauder allègrement là où le pouvoir de l’argent et l’illettrisme permettent n’importe quelle manipulation.
Mandela a cependant laissé un lourd héritage aux Sud Africains, aujourd’hui confrontés à des problèmes complexes de coexistence de races, avec des conflits violents et sanglants, engendrant la haine. La manière dont les Sud Africains vont régler la question nationale, dans un pays qui est un concentré fascinant de trois mondes (un monde développé, un monde sous-développé et un monde qui présage de l’avenir) intéresse tous les Africains qui ne sont pas encore arrivés à ce degré de complexité. Surtout qu’il s’agit d’un pays recelant des possibilités que beaucoup d’autres en Afrique n’ont pas, avec l’étendue de son territoire, son poids démographique et ses énormes ressources.
* Amady Aly Dieng est économiste, ancien fonctionnaire de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest.
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