Togo : Atteintes au droit à l’information et répression

Dans un pays où l’opposition n’est pas encore assez forte et bien structurée pour faire contrepoids à un pouvoir répressif qui viole les principes de démocratie et de bonne gouvernance, la presse reste un des espaces où la liberté d’expression permet de contrer les dérives. Aujourd’hui, le régime a fait des médias les ennemis à abattre.

Le 5 février 2005, la mort emporte le Général GNASSINGBE Eyadéma le feu président de la république togolaise. Pendant près de quatre décennies il a règne sur le Togo d'une main de fer, alliant assassinat, emprisonnement, violation de droit de l'homme envers toute personne s'opposant à son gouvernement. Après sa mort, le peuple togolais avait cru être libéré, mais c'est sans compter sur l'armée qui impose le fils du défunt au pouvoir. La répression qui a suivi le soulèvement du peuple a conduit à une élection truquée pour légitimer le coup d'État de Gnassingbe-fils.

Malgré les protestations du peuple togolais Faure Gnassingbe est maintenu au pouvoir dans un bain de sang qui a fait, selon l'ONU, 800 morts. Depuis, le nouveau président règne dans la continuité sur le petit pays de l'Afrique de l'ouest. Répression systématique de toute protestation, assignations de journaliste en justice, fermeture de radio, interdiction de parution sont les quelques actions menés par le régime du Rassemblement du Peuple Togolais.

Réélu le 4 mars 2010 pour un second mandat, le président Faure continue d'utiliser les mêmes méthodes qui lui ont permis de rester au pouvoir en 2005. Alors que le peuple croupit sous le poids de la misère: absence infrastructure sanitaire, dégradation des routes, manque d'eau potable... le régime préfère faire une chasse aux médias qui osent dénoncer leurs mauvaises actions. Ainsi trois radios viennent d'être interdites d'émettre et deux journaux assignés en justice. Il s'agit de la Radio Métropolys, X-Solair, Providence Fm, Golfe Info et le bimensuel Béninois Tribune d'Afrique.

LES REPROCHES A LA PRESSE...

Les médias pour amener la population à comprendre l'actualité politique organisent depuis quelques temps des émissions interactives. Ces émissions souvent en langue locale donne l'occasion à la population de se prononce en directe ou de poser des questions aux invités. Soulignons que 80% de la population togolaise est analphabète et que beaucoup participent à ces émissions. Ceci n'est pas du goût du pouvoir en place qui voit des risques de soulèvement de la population. Tous les moyens sont donc bon pour empêcher ces médias de continuer ces émissions.

La radio X-Solair principalement ciblée est accusé après plusieurs années d'existence de ne pas possédée une licence d'installation et est prié de fermer ses portent. Or cette radio paie chaque année des taxes à l'État. Deux autres radios sont fermées dans le sillage de X-Solair pour masquer l'acharnement contre cette dernière. C'est le cas de la Radio Métropolys et Providence qui sont
accusées d'avoir des infrastructure vétustes en plus de l'absence de licence. Tout porte à croire que lé régime ne veut plus de ces médias, d'autant plus que le dossier pour l'obtention de la licence est déposé au niveau du ministère compétant et de la Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication (HAAC).

Il est reproché aux deux organes de presse écrite la tenue des propos diffamatoires à l'endroit de Mey Gnassingbe, le frère du chef de l'État togolais. Le bimensuel béninois avait été condamné le 25 août 2010 à payer une amende de 6 millions de FCfa et 60 millions de dommages et intérêts à Mey Gnassingbé pour l’avoir accusé d’être impliqué dans un trafic de drogue. A cela s’était ajoutée une interdiction de distribution au Togo.
Le procès en appel du magazine Tribune d’Afrique qui devait se tenir le vendredi 18 février passé a été reporté au 14 avril à la demande des plaignants sans explication. Et pendant tout ce temps, le journal ne paraîtra pas au Togo.

Golfe info, également condamné pour les mêmes faits et qui a fait appel de la décision, devra lui aussi patienter jusqu’au 14 avril ; toutefois ce journal paraît normalement. Le journal privé togolais, "Golfe Info", a été condamné par le tribunal de première instance de Lomé à payer une amende de 1,5 million de francs CFA (3.000 dollars US) pour avoir cité indûment l'Agence Nationale de Renseignement (ANR) dans une de ses éditions de septembre dernier.
Lors de l'audience, lapartie civile a réclamé le payement d'une amende de 100 millions de
FCFA, une suspension de parution du journal pour 3 mois et des obligations de faire publier des démentis sur la source de l'information.

Dans son réquisitoire, le Parquet a demandé une amende de 1,5 million de FCFA, une suspension du journal pour 2 mois ainsi que la publication de démentis.

"Golfe Info", un journal paraissant les lundi, mercredi et vendredi, avait publié, dans son édition du 30 septembre dernier, un article sur l'arrestation d'un animateur de la Télévision togolaise (TVT), Eugène Attigan, dans une affaire de trafic de drogue. Ce dernier, arrêté à l'aéroport international de Lomé selon plusieurs sources concordantes, ferait également office de conseiller à la présidence.


Dans un article intitulé "Trafic de drogue au Togo: la présidence de plus en plus
embarrassée", "Golfe Info" avait écrit que l'animateur de la chaîne nationale, TVT, arrêté, dispose d'un passeport diplomatique, citant "une source proche de l'Agence nationale du renseignement" (ANR).

Le journal, qui soupçonne l'animateur de détenir un passeport diplomatique parce que officiant comme conseiller à la Présidence a cité, comme source, l'ANR.

En cette année 2011 ou les médias réclament plus la liberté d'expression et d'information, le régime au pouvoir depuis 1967 ne l'entend pas de cette oreille. Il faut donc une forte mobilisation des mouvements sociaux, surtout après le FSM de Dakar, pour peser sur les décisions arbitraires des dirigeants africains. Surtout au Togo ou se prépare actuellement les municipales c'est une nécessité vitale pour la démocratie et la transparence des élections. Des actions sont menées pour la réouverture des radios et un abandon des poursuites contre les presses

* Par Bernard Bokodjin est, Sociologue communicateur - ATTAC/CADTM-Togo

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