Uemoa : La nécessité d’une réforme des politiques de convergence

Depuis que le franc Cfa rythme la vie économique dans ce qu’on appelait « Afrique occidentale française », mieux encore, depuis la création de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), ses pays membres sont astreints à mettre en œuvre des critères de convergence économique. Après quinze ans de réformes économiques, le moment est arrivé d’apprécier le chemin parcouru en vue d’un ajustement efficient.

Il serait hasardeux de pratiquer la politique de l’autruche à cette étape de la vie de l’Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine (Uemoa). En effet, il apparaît impératif d’évaluer les réformes engagées depuis quinze ans dans le cadre des politiques d’intégration afin de repartir sur de nouvelles bases. Ce sentiment est très partagé par plusieurs acteurs concernés par lesdites réformes entreprises pour affermir l’intégration économique au sein de l’UEMOA. C’est aussi la conclusion à laquelle ont abouti les participants à l’atelier d’information et de partage organisé par le Centre de Recherche pour le Développement International (Crdi) et l’UEMOA, en collaboration avec Mediadev Africa, à l’intention des journalistes, le 30 octobre 2009 à Dakar.

Cette rencontre, organisée en prélude au colloque sur : « Intégration régionale et stratégies régionales de réduction de la pauvreté » qui se tient du 8 au 10 décembre 2009 à Ouagadougou, a révélé que chercheurs, cadres de l’Uemoa et journalistes sont convaincus qu’il est impératif d’opérer un ajustement efficient des réformes antérieures et changer de stratégie de mise en œuvre pour celles futures.

Une réforme inconnue des acteurs, potentiels bénéficiaires de celle-ci, ne peut atteindre ses objectifs. Lorsqu’on instaure par exemple le Tarif Extérieur Commun (TEC) et que les opérateurs économiques, dont les activités sont directement concernées subissent d’abord les contrecoups de la réforme avant d’en avoir des informations, il y a certainement quelque chose à corriger. (…) Comprenez qu’il y a visiblement là un problème de communication qui reste en suspens. Pour mettre en évidence la méconnaissance par les citoyens des réformes engagées par l’Union, les exemples sont nombreux dans l’article intitulé « Intégration : quand les Béninois parlent de l’Uemoa », publié dans le numéro 1632 du 25 juin 2009 du quotidien « L’Informateur », paraissant au Bénin.

Lorsqu’une réforme est méconnue ou mal connue des acteurs essentiels, il est évident qu’elle ne s’applique pas convenablement. A titre d’exemple, selon une directive de l’Union, les étudiants ressortissants de l’espace UEMOA doivent être traités de la même manière dans toutes les universités publiques. Mais en réalité, cette réforme ne s’applique pas parce que les recteurs d’université attendent d’être assurés de se faire rembourser le manque à gagner qu’engendre la mise en œuvre de cette directive. Là, il ne s’agit pas forcément d’un manque d’information, mais plutôt d’une absence de mesures d’accompagnement indispensables à la mise en œuvre de ladite réforme.

Dans ce registre également, les exemples sont multiples et montrent que pour nombre de politiques de convergence engagées à l’échelle de l’UEMOA, il y a une insuffisance ou parfois absence de réformes nationales dans les différents Etats membres de l’Union. Toutes choses qui ne favorisent pas l’appropriation des politiques de convergence en vue de leur application efficiente. En 2008, un avocat béninois se plaignait en pleine conférence de presse des difficultés qu’il avait à installer un cabinet dans un pays de l’UEMOA frontalier au Bénin. Pourtant, des directives de l’Union, adoptées par les chefs d’Etat, le lui permettent.

Il ne s’agit pas d’un luxe que de souhaiter qu’à l’occasion de ses quinze ans d’existence, l’Uemoa engage une « réforme de ses réformes » si la réduction de la pauvreté est effectivement l’objectif final des politiques d’intégration. Le cadre idéal qu’offre la tenue en décembre 2009 du colloque de Ouagadougou sur « Intégration régionale et stratégie régionale de réduction de la pauvreté » devrait être saisi par les différents acteurs impliqués, au premier chef les décideurs, pour une bonne analyse de la situation en vue du changement qualitatif qui s’impose.

* Aubin Towanou est un journaliste économiste béninois.

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