Environnement social des MSM au Sénégal

Des pistes pour renforcer le leadership des activistes de la société civile

Les hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes (MSM, en sigle anglais), comme les travailleuses du sexe et les personnes vivant avec le VIH, composent la cible prioritaire appelée « populations spécifiques ». Au Sénégal, leur exposition accentuée au virus du sida fait que des stratégies ciblées sont définies à leur intention pour améliorer leur niveau de connaissances et accroître, du coup, leur niveau de protection. Ceci permet en même temps de limiter l’incidence au sein de la population générale, compte tenu de la concomitance des rapports bisexuels des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes. Une concomitance estimée à 95%.

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K T

L’étude de l’environnement social des MSM, menée sous la conduite de Cheikh Ibrahima Niang du Programme Sahara de l’Institut des Sciences de l’Environnement de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (ISE/UCAD) montre en quoi les dernières crises d’homophobie intervenues au Sénégal ont perturbé les efforts de prévention et de prise en charge en direction de cette cible.

Les groupes spécifiques, notamment les hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes (MSM en sigle anglais), ont toujours préoccupé les autorités sénégalaises dans la lutte contre le VIH/sida. Le Conseil national de lutte contre le Sida (CNLS) qui est l’instance nationale de coordination de la réponse a toujours été appuyé par des organisations de la société civile qui, avec l’appui d’organismes financiers internationaux, accordent une large place à la composante « populations spécifiques » dans leurs plans d’action et programmes.

Pour contribuer à l’atteinte des résultats du Programme Régional Africain de l’Alliance Internationale (2008-2010), l’Alliance nationale de lutte contre le sida au Sénégal (ANCS) s’est proposée de réaliser une étude qualitative à visée descriptive et analytique sur « l'environnement social des MSM afin d'améliorer et renforcer le leadership de la société civile à mieux adresser la stigmatisation et la discrimination des MSM ». (1)

L’objectif général de cette étude est d’analyser l’environnement social des Hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes en vue de renforcer les capacités de la société civile à prendre en charge les questions de stigmatisation, de discrimination et de violence qui affectent leur accès à la prévention et au traitement du sida.

Le docteur Cheikh Ibrahima Niang, du Programme Sahara de l’Institut des Sciences de l’Environnement de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (ISE/UCAD) , a été identifié pour mener cette étude. La méthodologie qu’il a utilisée est celle d’une recherche qualitative (avec des entretiens individuels non structurés, des entretiens semi-structurés, des focus groupes, des récits de cas, des récits de vie et des listes libres) appliquée aux MSM, aux acteurs de la société civile et à divers segments des communautés de base.

Les résultats de l’étude mettent en exergue, « un contexte national marqué par la montée du chômage, de la pauvreté et de divers indicateurs de crises socioéconomiques profondes dans lesquelles émerge un discours politico-religieux homophobe puissamment relayé par les médias ».

L’étude démontre également « les incohérences des dispositions du Code Pénal (sanctionnant l’homosexualité) par rapport à la reconnaissance des libertés fondamentales et des droits de l’homme inscrits dans la constitution du Sénégal. Cette incohérence est d’autant plus flagrante que le Sénégal avait, jusque là, réussi à enregistrer des succès notoires dans l’intégration des MSM dans les stratégies nationales de lutte contre le sida».

L’on relève, en outre, « qu’à partir du début de l’année 2008 on a assisté à une montée fulgurante de l’homophobie, avec une multiplication des cas de violence et l’amplification d’un discours légitimant celles-ci. Les niveaux communautaire et familial génèrent eux aussi diverses formes d’homophobie, de stigmatisation et d’exclusion sociale ».

Cette dégradation de l’environnement social a eu comme conséquence « une déstabilisation de la réponse au VIH en milieu MSM, qui se manifeste par des dysfonctionnements dans le déroulement des activités de prévention, un affaiblissement des capacités de négociation et d’utilisation du préservatif et un recul de dynamiques sociales appuyant les tests de dépistage et l’accès aux services de prise en charge et de traitement ».

L’auteur de l’étude a tiré des conclusions et formulé des recommandations en directions des acteurs de la lutte contre le VIH/sida. Dr Cheikh Ibrahima Niang a conclu que « Les ONG qui, jusqu’ici, avaient développé des approches pertinentes en matière de réponse au VIH en milieu MSM dans des situations considérées comme normales, ont manqué de moyens et de perspectives pour faire face aux situations de crise ». Il recommande ainsi « la conduite d’une réflexion stratégique pour mobiliser la société civile autour d’objectifs de continuité des activités de réponse et de transformation des environnements qui reproduisent l’homophobie et la vulnérabilité au VIH/SIDA »

Notes

(1) L’Alliance Nationale de Lutte contre le Sida, qui a commandité cette étude, est la principale organisation qui coordonne les activités menées par les acteurs communautaires au Sénégal, dans le cadre de la lutte contre le sida. L’étude est intitulée «Etude de l’environnement social des MSM en vue du renforcemeent du leadership de la société civile dans la lutte contre la stigmatisation et la discrimination ».

* Les articles de ce dossier sur l’environnement des MSM a été réalisée par l’équipe de l’ANCS, sous la direction de Magatte Mbodj Guèye, directrice exécutive de l’ANCS et la coordination de Madické Diagne, chargé de Communication de l’ANCS

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