Gambie : persécution de militantes des droits humains
Deux femmes, militantes des Droits de l’homme, sont poursuivies par le justice gambienne. Arrêtées le 11 octobre et détenues après que la liberté provisoire leur a été refusée, elles sont accusées de vol par une ONG espagnole. Mais en l’absence de la plaignante, c’est le gouvernement gambien qui semble vouloir profiter de cette affaire pour mener un règlement de comptes.
La dernière audience du procès de Docteur Isatou Touray, Directrice Exécutive et Amie Bojang-Sissoho, Coordonnatrice des programmes pour le Comité de la Gambie sur les Pratiques Traditionnelles (GAMCOTRAP), qui a eu lieu le mercredi 3 novembre 2010, sous la présidence du juge Emmanuel Nkea du Tribunal de Banjul, a commencé à susciter des interrogations.
Les deux femmes sont accusées du vol de 30.000 euros de Yolocamba Solidaridad et l’opinion publique en Gambie s'attendait à ce que le témoin principal, Yolocamba Solidaridad, soit représenté au procès par des citoyens espagnols. Mail ils n’étaient pas présents. Il est apparu que c’est l’Etat gambien qui a représenté Yolocamba Solidaridad.
La cour a entendu les témoignages de deux exciseuses, Amina Damba et Kaddy Damba, respectivement du Village de Taibatu à l’Ouest de Wulli dans la région de Upper River (URR) et du village de Saruja dans la région de Central River.Les femmes ont expliqué comment elles ont été impliquées dans les activités de GAMCOTRAP dont elles ont reçu chacune 3000 dalasis (environ 100 $). L’une d'entre elles a même déclaré que bien que sa profession soit exciseuse, si le gouvernement devait lui demander d'arrêter, elle le ferait. Cela est important pour tous ceux qui combattent les pratiques traditionnelles nuisibles. Cela pose également la question de savoir si le gouvernement est vraiment résolu à la suppression des pratiques traditionnelles nuisibles comme les mutilations génitales féminines, au moment où les professionnels n'attendent que lui pour prendre l'initiative.
Des villageoises innocentes ont été traînées devant la Cour pour témoigner des fonds reçus pour abandonner la pratique de l’excision. La décision de jeter les couteaux soit a été prise au Stade de Basse (Situé à 400 km de Banjul la capital) en présence des chefs de Districts de la Région de Upper River, des chefs de village, des responsables des femmes exciseuses, ainsi que des dignitaires et représentants d’organisations nationales et internationales, y compris une représentante de Yolocamba Solidaridad, Maria Jesus Rodriguez alias Susy qui avait publié un communiqué lors de la célébration. La Coalition pour des Droits de l'homme en Gambie espère que l'Etat n'osera pas traîner uniquement des femmes rurales gambiennes devant la cour et exclure les représentants de Yolocamba Solidarité comme témoins.
Le nouveau procureur général, Sainey Joof, a informé la cour de son intention d'introduire une nouvelle accusation de comptabilité frauduleuse, mais cela a été rejeté par le pool d’avocats de la défense mené par Me Lamin Mboge. Selon des témoins oculaires, le tribunal était plein à craquer et les témoins ont semblé exaspérés et distraits par leur manque de compréhension de ce que se passait.
Les deux femmes, défenseurs des Droits humains, ont passé dix jours en détention avant d’être libérées sous caution le 20 octobre 2010, après une audience dans une salle pleine à craquer du Tribunal de Banjul. La caution est fixée à un million 500 000 dalasis gambiens (environ 50, 000 $) ainsi qu’une propriété foncière en garantie.
Dr Isatou Touray, Directrice exécutive et Amie Bojang-Sissoho, Coordonnatrice de programmes pour le Comité de la Gambie sur les Pratiques Traditionnelles (GAMCOTRAP), avaient été arrêtées le lundi 11 octobre 2010 par les forces de sécurité gambiennes et détenues au Commissariat de police de Banjul. Elles ont été ensuite déférées à la Cour de Banjul le 12 octobre, qui leur a refusé la liberté provisoire avant de les envoyer à la prison de Mile Two. Elles sont accusées de vol de 30 000 euros reçus de l’ONG espagnole Yolocamba Solidaridad.
Il est difficile de comprendre l’intérêt du gouvernement pour une affaire civile liant deux organisations non gouvernementales. D’autant plus que la première commission d’enquête qu’il avait mise en place avait abouti à la conclusion que les allégations étaient infondées. La Coalition pour des Droits Humains en Gambie invite le gouvernement gambien à renoncer à l’intimidation des témoins et à leur permettre de parler librement sans contrainte ni manipulation. Il recommande vivement au gouvernement de retirer l’accusation criminelle en vue de permettre aux deux organisations non gouvernementales de régler le problème, s’il en existe entre eux, et éventuellement ouvrir une procédure civile sans interférence aucune. La Coalition exige, en outre, que si les représentants de Yolocamba Solidaridad ne peuvent ni comparaître comme témoin principal ni témoigner comme étant les principales victimes du vol, alors, le gouvernement gambien doit retirer la plainte du tribunal et leur permettre de poursuivre l’affaire par une procédure civile.
Des collègues de l'étranger se demandent même si GAMCOTRAP n’est pas perçue comme une menace politique par le gouvernement. La Coalition invite donc tous les défenseurs de Droits de l'homme à suivre de près le témoignage des femmes des villages. Elles sont d'habitude proches des gouverneurs et chefs de villages, qui sont d'habitude impliqués par l'organisation non gouvernementale à cause de l’aspect traditionnel. La Coalition invite aussi la défense à citer tous ces gouverneurs, des chefs de village, des femmes leaders pour témoigner de comment ils ont utilisé ce qu’ils ont reçu de GAMCOTRAP et s'ils l’ont fait pour des raisons politiques. Il s’agit là d’une occasion pour susciter un large débat pour montrer tous ceux qui ont pu bénéficier de ce programme sans tenir compte de l’appartenance politique. Les deux femmes apparaîtront de nouveau devant la cour le 22 novembre 2010.
* Organisations signataires :
- Réseau Inter Africain pour les Femmes, Médias, Genre et le Développement - (FAMEDEV)
- Fédération Internationale des Journalistes (IFJ)
- Syndicat des Professionnels de l'Information et de la Communication du Sénégal (SYNPICS)
- Rencontre Africaine de Défense Des Droits de l'Homme (RADDHO),
- Amnesty Internationale, Section Sénégal
- Radio -Voix Alternative pour les Gambiens (Radio AVG)
- Article 19
- Organisation Nationale des Droits de l'Homme (ONDH)
- Réseau Presse et Parlement du Sénégal (REPPAS)
- Union des Journalistes de l'Afrique de l’Ouest (UJAO).
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