L’accession au trône sénégalais : à qui la victoire ?

Macky Sall est arrivé au pouvoir au Sénégal dans un contexte tel que les attentes sont lourdes de la part des Sénégalais. Reste à voir jusqu’à quel point il pourra promouvoir des politiques alternatives en ruptures avec les pratiques de certains intérêts financiers, notamment dans le secteur des mines, notamment dans le secteur des mines qu’il a eu à diriger en tant que ministre.

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L B

Kingston, Canada - Pour les paysans et les petits commerçants vivant sous une monarchie féodale, la seule chose pire que de vivre sous la férule d’un despote pilleur était de ne pas en avoir. Lorsque les excès d’un roi amenaient les dissidents à chercher un remplaçant, tout le monde souffrait. Au cours des guerres, les moissons étaient volées et la jeunesse disparaissait dans le conflit ou la prostitution. Sans doute que la meilleure représentation de ces circonstances se retrouve dans la brillante pièce de théâtre de Bertold Brecht "Mère Courage et ses enfants", histoire qui se déroule au cœur de la Guerre de Trente Ans.

Pour la majorité des citoyens sénégalais, le récent résultat des urnes est vu comme une victoire dans le sens où il permet de ramener le calme dans des rues où les tensions étaient vives et où chacun retourne à ses affaires. Il n’y a pas de doute que le vainqueur, Macky Sall, a obtenu un soutien jubilatoire. Il s’est montré un politicien réel en gardant son calme et son professionnalisme, cependant que la rhétorique fantastique de son opposant, Abdoulaye Wade, sombrait de plus en plus dans la sénilité. D’autre part, Macky donnait des signes d’humilité et une capacité à travailler avec d’autres. Il s’est abandonné aussi à un certain populisme en reconnaissant le fait qu’un grand nombre de personnes souffrent.

Alors que les premiers résultats tombaient, beaucoup ont été submergés par l’euphorie et la fierté parce que le pays avait été capable de traverser un moment politique difficile sans basculer dans la crise comme la Côte d’Ivoire. Ceci mis à part, tout au long du processus électoral, la plupart des gens à qui j’ai parlé étaient plutôt cyniques. Ils soupçonnent tous les politiciens de voler le peuple. Pour la plupart, les élections apparaissaient comme un combat territorial entre barons de la drogue. Ce qui semblait importer aux élus ne semblait pas être l’homme de la rue, mais plutôt : qui va pouvoir s’approprier le trésor ?

LA LIBERTE LIBERALE IMPORTE

Toutefois il ne faut pas sous-estimer l’importance qu’il y a à mettre un terme rapide à la glissade vers l’autoritarisme qui s’était précédemment installé et prônée par la rhétorique au vitriol de Wade, qui traitait les protestataires d’ordures à balayer. Alors que les résultats du scrutin du premier tour tombaient , qui montrait Wade en perte de vitesse, l’autorité de la police dans la rue s’est immédiatement dégonflée et plutôt que d’occuper les rues qui entourent la Place de l’Indépendance, elle s’est trouvée reléguée dans des rues adjacentes. Elle était même polie avec les passants. S’il a essayé toutes les combines frauduleuses connues, Wade était bien loin de pouvoir faire le coup de Mugabe ou de pouvoir mettre un terme à l’élection, comme l’a fait Kibaki au Kenya en 2007, lorsqu’il est devenu évident qu’il était entrain de perdre.

Les protestations et la violence policière à Dakar ont mis en évidence le fait qu’il ne faut jamais sous-estimer les valeurs libérales démocratiques, même si elles sont d’abord symboliques et donc ne changent pas les rapports de pouvoir dans la société. Même les supporters de Wade, auxquels j’ai parlé, étaient choqués par les évènements du dimanche 18 février, jour où une colère spontanée a déferlé sur la police dans tous les quartiers de la ville.

A Rufisque, une ville à 28 km de Dakar, un jeune homme a été tué par balle par la police, amenant le total des morts de ces semaines à au moins sept. Des villes dans tout le pays ont connu des situations similaires. Mais ce qu’il y a de peut-être de plus significatif est le fait que les jeunes ont pris les principales routes d’assaut. Qu’ils s’en soient souvenu ou pas, c’était là une des tactiques les plus efficaces utilisées sur le chemin de l’indépendance dans de nombreux pays du continent. C’est probablement ce jour-là que Wade a définitivement perdu les élections, si ce n’était déjà fait.

Macky Sall devrait être soutenu dans la mesure où il a indiqué sa volonté d’implanter un certains nombres de changements en ce qui concerne le pouvoir présidentiel et d’augmenter l’espace pour l’expression politique publique. Maintenant, il faut que les gens soient attentifs et vigilants. Sall joue exceptionnellement bien sous les feux de la rampe mais, évidemment, il était le protégé de Wade. Il affirme qu’il va travailler à l’éradication de la pauvreté et améliorer le système de santé et de formation. Le problème toutefois, est qu’il est extrêmement vague quant à la façon dont il va aborder les problèmes. De plus, ses actions passées ont montré qu’il est un allié clé du 1% global.

L’ETAT DES LIEUX DE L’ETAT

La base de cette politique de guerre des gangs provient en partie du fait que les caisses de l’Etat sont comme un fromage suisse (Fromage suisse était le nom très approprié du payeur militaire dans "Mère Courage" de Brecht). Idrissa Seck était l’ancien Premier ministre de Wade. Il a été impliqué dans la gestion douteuse de finances destinées à la construction de route et a été emprisonné en 2005. Et Sall était le justicier. A son tour, Seck a accusé Sall de s’être approprié des fonds publics pour un montant de 7 milliards de francs CFA (3.5 millions de dollars). Les accusations contre Seck ont été abandonnées, mais Sall s’est brouillé avec Wade en 2008, lorsqu’il a commencé à poser des questions sur la gestion de contrats de construction étatiques par son fils Karim.

Ceci concerne les sphères éthérées mais le problème le plus insidieux touchant les trous dans les caisses de l’Etat est que l’abus de fonds publics constitue une autre réalité. Les programmes de libéralisation et de privatisation ont permis à des fonctionnaires de créer leur propre compagnie et ensuite d’obtenir divers contrats qui sont alloués à des tarifs grandement surfaits.

Wade a créé en 2007 un département anti-corruption qui supervise l’allocation des contrats publics. La même année, ce service a rapporté que 70% des contrats de l’Etat souffraient d’un vice. Lorsqu’il a découvert que Karim Wade était impliqué dans des transactions douteuses avec une compagnie américaine, Global Voice, le président a proclamé que ce service n’avait pas autorité pour superviser des contrats présidentiels.

L’argent coulait ostensiblement à flot en direction du fils et de la fille de Wade. Celle-ci a organisé en 2010 un festival international des arts et de la musique qui a attiré des artistes du monde entier. Certains n’ont toujours pas été payés. Mais ce sont surtout les transactions foncières et les contrats de télécommunication qui sont le plus difficile à suivre, en partie parce que ces formes de corruption passent par des contrats privés que les membres du gouvernement ont réussi à contrôler sous le couvert d’une sorte de loyer dont ils fixent eux-mêmes le pourcentage. Wade a même procédé de la sorte avec sa statue de la Renaissance.

SALL L’ANGUILLE

Le lendemain du premier tour de scrutin, Sall se vantait d’avoir fait partie des intimes de Wade. Pourtant le jour suivant, il proclamait que s’il gagnait, il demanderait un audit complet de l’Etat et assurait de plus de transparence dans les affaires du gouvernement. Même si il a été impliqué dans des détournements de fonds par le passé, ceci serait sans aucun doute un pas dans la bonne direction. Mais au-delà de cela, quelle économie envisage-t-il ? Et surtout, de quelle partie de l’économie ne parle-t-il pas?

Sall a aussi suggéré que des éléments-clés de sa politique économique consisteront à diminuer le coût de la vie (on penserait qu’il pourrait envisager d’augmenter les salaires mais on attend toujours le candidat qui ferait une telle proposition). Il a aussi dit qu’il créerait de l’emploi en investissant 300 millions de francs (US$ 150 millions) dans divers domaines, dont le tourisme, en plus d’un projet de création de 500 000 emplois par le biais des jeunes entrepreneurs dans des activités de loisir et des artisanats pour touristes. De plus, il parle d’exonération d’impôts à 80% pour les expatriés à la retraite afin de les faire revenir au Sénégal pour au moins six mois de l’année, de la restructuration du secteur touristique (ce qui va presque certainement entraîner la privatisation des ressources de l’Etat) et d’une augmentation de la TVA dans les services touristiques.

Ceci apparaîtra étonnant pour la majorité des Sénégalais, en particulier parce que ces propos sont tenus par un homme qui a été ministre des Mines et des ressources maritimes. La population veut des restrictions imposées aux bateaux de pêche étrangers dans leurs eaux territoriales, afin qu’elle puisse retrouver sa propre industrie de pêche. Elle veut une revitalisation de l’industrie agricole. Elle veut des salaires décents de la part de ses employeurs. Elle voudra probablement aussi que son industrie minière soutienne des industries secondaires qui offrent de l’emploi aux jeunes fraîchement diplômés. Le problème, toutefois, est que nombreux sont les Sénégalais qui ne sont pas conscients du boom minier qui a actuellement lieu dans leur pays. Le fait que Sall soit si discret sur cette question devrait amener les gens à poser des questions insistantes sur son rôle lorsqu’il était le ministre responsable.

Macky Sall a aussi été autrefois à la tête de la compagnie pétrolière de l’Etat et on penserait que ceci devrait le rendre un petit sceptique lorsqu’il mise l’avenir du pays sur les voyages aériens alors que les réserves globales déclinent. Mis à part la limite pratique de son projet, croit-il vraiment que la jeunesse de Y’en a marre aspire à des carrières de porteurs de valises des vacanciers européens ? De plus, les lieux touristiques font déjà l’expérience d’un déclin lié à la crise financière. Les gens veulent de la dignité et non une nouvelle servitude.

LES POLLUEURS ET LE 1%

La raison probable du silence de Sall à propos du plus grand trésor du Sénégal reste les allégations l’accusant d’avoir été impliqué dans la remise dudit trésor entre les mains des pires pollueurs qui, en outre, violent gravement les droits humains. Je fais ici référence à West African Birimian Geological Belt à Tambacounda, qui s’avère détenir plus de 10 millions d’onces de ressources en or. Sall était ministre des Mines lorsque la Constitution a été changée pour favoriser l’exploration internationale. La compagnie canadienne Teranga Gold Corp a obtenu 1500 km et a depuis lors souligné que "le Sénégal est entrain de se développer jusqu’à devenir un district aurifère au niveau international, au sein de cette ceinture dans lequel Teranga Gold Corp détient une importante part".

Selon Oxfam, la population déplacée par une concession adjacente à une firme australienne vit dans une extrême pauvreté. Aucune étude n’a encore examiné la misère de ceux qui sont affectés par d’autres mines. La pauvreté extrême de la population locale n’est pas atteint les limites de l’intolérable pour la compagnie qui veut une force de travail docile afin de maintenir ses mines opérationnelles 24 heures sur 24.

Le problème s’est manifesté lorsque les protestations contre la pauvreté et le manque d’emploi en 2008 se sont transformées en émeutes, faisant deux morts et conduisant à 26 arrestations. A Kedougou, où au moins une personne a subi des blessures fatales au cours des émeutes, le gouverneur, Mamadou Diom, a reconnu que les manifestations ont été causées, en partie du moins, par la perception que les mines n’emploient pas de travailleurs locaux Il est rapporté, dans un câble américain confidentiel paru dans la presse, que Diom aurait déclaré : " Les gens doivent comprendre que l’exploitation de l’or à grande échelle est une chose nouvelle et que les emplois, en particulier ceux requérant des travailleurs qualifiés, ne seront pas disponibles de suite". Il fera ensuite montre de peu de sympathie à l’égard de ses administrés. "Ils sont paresseux", aurait-il dit. "Tout ce qu’ils veulent c’est devenir riches dans de petites mines et ensuite dépenser leur argent pour des femmes et de l’alcool".

En toute justice, les compagnies paient environ trois fois le salaire moyen national et ont un bilan relativement bon en matière de sécurité des employés. Mais il y a d’autres questions qui se posent comme celle de savoir combien de temps les mines vont-elles être exploitées et si les employés obtiennent des compétences utilisables ailleurs. C’est utile d’examiner les bilans.

Parmi les responsables exécutifs de Teranga dans la région, on trouve Kathy Sipos et Yani Roditis, deux vice-présidents qui ont tous deux derrière eux une longue expérience chez Barrick Gold et ont travaillé au Pérou, au Chili et en Argentine - un aspect sur lequel je reviendrai.

Une autre compagnie, arabo-canadienne, Iamgold participe aussi à la ruée sur l’or au Sénégal. Le grand patron est Stephen JJ Letwin, ancien vice-président de la compagnie Enbridge qui construit des pipelines à travers l’Amérique du Nord dans le but d’acheminer des sables bitumeux. Un des ces pipelines a des démêlés avec l’une des communautés des Premières Nations (indigènes) qui refuse de voir son écosystème détruit. Benjamin Little, un autre ancien employé de Barrick Gold, fait aussi partie du conseil d’administration de Iamgold, ainsi que de la chambre du commerce Canada-Pérou. Ceci nous ramène à l’Amérique latine.

Les multinationales canadiennes qui exploitent l’or ont été la cible d’un immense mouvement de résistance indigène. Au Pérou, où les compagnies canadiennes ont investit plus de 2,3 milliards de dollars, le gouvernement péruvien a sévi contre les manifestants autochtones et a fait au moins 50 morts. Beaucoup de Sénégalais ont été outrés par la mort de sept manifestants et ont demandé l’assistance de la communauté internationale afin de mettre un terme à la terreur de Wade. Toutefois la réalité est que, si la communauté internationale tolère 50 morts au Pérou, pourquoi se soucierait-elle de sept morts sénégalais ? Ce sont ces même gens qui encaissent des millions qui pourraient servir à soutenir des programmes d’assistance communautaire et de diversification économique au Sénégal.

En 2003, un exécutif de Iamgold, Paul Olmstead, a encaissé un salaire de presque 600 000 dollars, avant même que le gisement aurifère ne soit confirmé et coté en bourse. Combien se mettent-ils dans la poche maintenant et combien va dans celle des investisseurs ? Quel pourcentage va au peuple sénégalais et sous quelle forme ? Certainement que les salaires des employés sont pris en compte et mes propres sources à Dakar me disent que ceux-ci se montent à environs 7000 dollars par année alors que le revenu moyen annuel est de 1100 dollars. Mais ceci est insuffisant si l’on considère que tout est importé en matière de consommation, (même les denrées de base comme le riz, les patates et les onions). Vous auriez de la peine à trouver un Sénégalais qui gagne 7000 dollars et qui estime le contrat équitable. Stephen Letwin est très conscient du fait "qu’avec le temps ils voudront davantage"

Au-delà du manque à gagner potentiel de ces compagnies, il y aussi lieu de s’interroger sur le possible impact environnemental à long terme. Une raison principale qui pousse à se poser cette question se trouve dans les rapports annuels de ces compagnies, qui indiquent clairement qu’elles prévoient des opérations éclairs. Teranga est optimiste et envisage 10-15 ans d’exploitation (ceci est une projection nouvelle, la première ne s’étendant que sur 9 ans). Mais alors, quel sera ensuite le sort de ceux qui ont travaillé dans cette industrie ? Qu’arrivera-t-il à ceux qui ont perdu leurs pâturages et qui n’auront plus qu’à nettoyer et réparer les dommages à l’environnement ?

Le bilan de bons nombres de ces compagnies n’est pas bon. Chet Idziszek est le président et le directeur de Oromin, une autre compagnie impliquée. En 1990, il lui a été octroyé la reconnaissance de "mining man of the year" (l’homme de l’année dans le secteur des mines) - je devine qu’il est supposé que ce sont toujours des hommes - pour son rôle dans le "développement" de Eskay Creek, en Colombie britannique au Canada, le territoire traditionnel de la Première Nation Tahltan. Barrick a acheté la mine en 2001, a commencé l’exploitation en 2005. En 2008, ne produisant plus rien, elle a été fermée.

Pour une courte période les Tahltan ont connu le presque plein emploi. Mais les emplois pour la population locale consistaient à être chauffeur de camion, à travailler comme domestique ou garçon de café. Lorsque Barrick Gold s’est retiré, la communauté Tahltan Iskut n’en a guère gardé de trace , l’exception de deux lacs qui, selon Mining Watch, sont probablement gravement pollués. Mais il est impossible de vérifier tout cela, parce que loi canadienne protège les compagnies minières des enquêtes qui rendraient de tels détails publics.

Ces cas sont particulièrement perturbants lorsqu’on considère que la majeure partie de cet or ne servira pas à développer de l’électronique ou des dents en or ou quelque chose d’utile pour la société, mais finira en lingots conservés dans les coffres-forts des super-riches.

MACKY ET LES MINES

Macky Sall est lui-même un ingénieur des mines. Il était ministre des Mines lorsque ces compagnies se sont installées au Sénégal. On ne peut s’empêcher d’imaginer qu’il a souvent dîné avec ces exécutifs qui s’emparent d’une si grande partie des richesses du pays. Les Sénégalais devraient lui demander ce qu’il pense des énormes inégalités entre leurs revenus et ceux de la majorité des Sénégalais. Ils devraient aussi demander si ces compagnies ont soutenu sa campagne et lui ont permis de voyager continuellement dans tout le pays au cours des deux dernières années.

Il est aussi utile de noter qu’ailleurs en Afrique, les gouvernements reconsidèrent la taxation et les arrangements de propriété avec les compagnies minières. La Zambie et l’Afrique du Sud en constituent deux exemples, bien que Julius Malema ait été expulsé de l’ANC pour avoir suggéré la nationalisation des mines. Même le gouvernement minoritaire australien a réussi à faire passer une nouvelle taxe sur les mines. A moins que Macky Sall déclare publiquement le contraire, la population sénégalaise doit être consciente qu’il fréquentait des gens profondément impliqués dans les violations des droits humains et dans une destruction colossale de l’environnement. De plus, les Sénégalais doivent savoir que la majorité des travailleurs «importés» dans le pays pour travailler dans les mines viennent avec des visas à court terme et ne reçoivent aucun bénéfice de l’Etat, alors qu’ils doivent s’acquitter de taxes et sont sujets à la discrimination. Même ceux qui viennent avec des compétences sont payés 6.3 dollars de moins que la moyenne des Canadiens et sont beaucoup plus sujets au chômage,

LE DILEMME DE SALL

Sall a une tâche gigantesque pour gérer le chômage massif (jusqu’à 50% dans certains secteurs démographiques), sans qu’il ne puisse rien faire pour altérer l’économie qui lui est sous-jacente. Cette fâcheuse situation ressemble à s’y méprendre à la description que faisait Frantz Fanon en 1961 : " L’économie nationale dans la période de l’indépendance ne commence pas sur de nouvelles bases. Elle est toujours centrée sur la récolte des cacahuètes, du cacao et des olives. De même, il n’y a rien nouveau dans le marketing des produits de base et aucune nouvelle industrie ne voit le jour. Nous continuons d’envoyer des matières premières. Nous continuons d’être les petits paysans spécialisés dans la matière brute des Européens."

Sall n’a pas proposé de changement fondamental à cette situation. Jusque là, il n’a fait qu’indiquer que la jeunesse sans emploi servirait des cocktails et feront visiter les sites touristiques pour les patrons de l’industrie minière qui vont et viennent dans le pays. Actuellement, dans les bars fréquentés par les ingénieurs, les prostituées les dépassent déjà en nombre et les garçons continuent de faire du rap dans les bidonvilles.

Un coup d’œil à la dernière vidéo de Beuz Mc et dont le titre est "fou rewmi dieum" (où allons-nous ?) suggère que la jeunesse de Y’en a marre est bien plus au fait des besoins de l’économie que le président. Ils démontrent le besoin d’infrastructures et d’emplois dans le secteur public, de traitement des déchets et d’assainissement, de construction de route, de fourniture d’électricité qui ne mette pas les compagnies minières avant les mères allaitantes, d’eau potable, d’énergie à meilleur marché, de soins de santé et d’éducation (le taux d’alphabétisation est de 42%, bien en dessous du taux de 62% subsaharien)

La réalité toutefois est que rien de cela ne peut se produire à moins de rogner les ailes au pouvoir du 1% global dont le profit se fait au détriment du futur de nos enfants. De ce point de vue, Sall ne donne pas d’indication de vouloir ou pouvoir se charger de cette tâche.

CE TEXTE VOUS A ETE PROPOSE PAR PAMBAZUKA NEWS




* L’auteur est un universitaire canadien, qui a préféré garder l’anonymat.


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