Togo : Le Front SAGE en lutte pour restaurer la démocratie
Porté sur les fonts baptismaux le 16 mars dernier, le Front des Organisations pour la Sauvegarde des Acquis Démocratiques et une Gouvernance Efficience (Front SAGE) est très actif depuis à Lomé. Il rejoint sur le terrain de la mobilisation un autre front dans les manifestations qui visent à mettre la pression sur le régime pour la démocratie et la dignité du peuple togolais.
Après la commémoration des 20 ans des Martyrs de la démocratie au Togo le 12 avril dernier, journée au passage décrété Journée de la Dignité des Togolais, le Front SAGE avait appelé le peuple togolais à une marche pacifique le 16 avril 2011 à travers les rues de Lomé. Dénommée « marche pour la défense de la Dignité du Togolais », cette marche devait partir de la lagune de Bè, endroit symbolique, plein d’histoire, où il y à 20 ans, 28 corps ont été retrouvés flottant sur la lagune, victimes des exactions des pouvoirs en place, hostiles à l’émergence d’une quelconque démocratie. Ces 28 personnes ont payé de leurs vies le prix fort de la libération de la vie politique avec le multipartisme, l’amnistie générale pour les prisonniers, les exilés politiques de tous genres, la liberté de presse, etc. Ils constituent les premiers togolais tués en masse pour que naisse l’Etat de droit dans notre pays.
Pour le Front SAGE, 20 ans après les acquis démocratiques obtenus suite à d’âpres luttes, le constat est que des pans essentiels de ces acquis ont été ignorés ou vidés de leur contenus comme c’est le cas de la Constitution d’octobre 1992 complètement dépouillée en décembre 2002 de la substance qui fait d’elle un texte démocratique.
Annoncée depuis le 6 avril dernier, la « marche pour la Dignité du peuple Togolais » avait pour point de chute la place de l’indépendance du Togo ou un meeting d’explications et de sensibilisation est prévu. Mais contre toute attente, malgré le caractère pacifique de la marche, les ministères de la sécurité et celui de la décentralisation, de l’administration territorial et des collectivités locales ont refusé que la marche se termine à la place de l’indépendance. Pourtant c’est une place pour tous les citoyens du Togo et quiconque voudrait aller se recueillir en ce lieu devrait le faire librement. Le Front dans un communiqué publié le 14 avril « dénonce avec la dernière vigueur cette interdiction d’accès à la place de l’indépendance et demande aux autorités togolaises de faire en sorte que cette place, qui, dans tout les pays du monde, est une place accessible à tous les citoyens, soit désormais d’accès libre aux Togolais». Ceci conduisit le Front SAGE à choisir finalement le stade omnisport de Lomé, terrain de handball pour leur meeting à la fin de la marche.
Depuis l’annonce de la marche du 16 avril, les rumeurs cour sur les négociations entre les responsables du Front et ceux du FRAC (Front Républicain pour l’Alternance et le Changement) qui organisent des marches de protestation tous les samedis depuis l’élection présidentielle du 4 mars 2010 pour réclamer la victoire du candidat Fabre Jean-Pierre, président de l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC). Certains observateurs de la scène politique togolaise et surtout les militants de l’ANC voient d’un mauvais œil les initiatives du Front, malgré que les revendications diffèrent. Et les autorités ont voulu provoquer une collision entre ceux qu’on peut appeler les deux géants de la scène politique togolaise.
En effet après avoir refusé que la marche du Front se termine à la place de l’indépendance et sur l’esplanade du Palais des Congrès de Lomé, les autorités ont eu l’idée de proposer aux responsables du Front que le point de chute de leur marche soit la plage en face de l’hôtel Ibis de Lomé. Or, le 16 avril est un samedi et le FRAC tient sa marche hebdomadaire et son meeting, depuis un peu plus d’un an, se tient toujours à cette place. Comme quoi les autorités voulaient créer la division entre les deux groupes pour mieux régner, mais les responsables du Front ont vite su lire le jeu et ont tout simplement rejeté cette proposition. Finalement les deux marches prévues pour le même jour auront des points de chute différente, ce qui est mieux pour les partisans de chaque camp.
«Malgré tous les sacrifices depuis plusieurs années pour la démocratie et la liberté du peuple togolais, les choses ne changent pas, cette marche constitue un symbole de dénonciation de tout cela », selon Me Kossi Afangbedji Jil-Benoit, rapporteur chargé de l’information du Front SAGE et président de l’Association des Catholiques pour l’Abolition de la Torture).
* Bernard Dodji Bokodjin est membre d’ATTAC Togo
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