Libye : Que sont les centres de tri devenus ?

Des années durant, l'Europe, l'Occident en général, ont fermé les yeux sur les dérives du régime de Khadafi. Tripoli était un allié trop important pour qu'on jette l'oeil dans son arrière-cour, pour qu'on se préoccupe des libertés et de la démocratie dans la Grande Jamahiriya. Il y avait le pétrole, il y avait les pétro-dollars, il y avait aussi cette barrière que Khadafi avait établie pour empêcher l'invasion par les flux migratoires en provenance d'Afrique sub-saharienne. Pour Amadou Amath, «il est temps de regarder en face les résultats de la sinistre coopération sécuritaire initiée par l’Europe, singulièrement la France».

Au moment ou la violence extrême se fait jour contre les manifestants en Libye, dévoilant la face hideuse du régime Kadhafi, condamné par tous aujourd’hui, il est urgent de rappeler l’attitude de l'Europe, hier, lorsqu’elle a délégué à ce même régime la "gestion" des flux migratoires en provenance notamment d'Afrique sub-saharienne (1).

Par « gestion », il faut entendre « Centre de tri ». Des camps de rétention, de « stockage » d’êtres humains dans des conditions de vie épouvantables, selon les témoignages de ceux qui en sont sortis mais aussi d’ONG. Pas de photos, pas de commentaires, pas d’indignation.

En ces temps d’affrontements en Libye, que sont ces centres devenus ? Où sont-ils ? Combien de personnes y sont-elles retenues ? Que fait la communauté internationale ?

Il est temps de regarder en face les résultats de la sinistre coopération sécuritaire initiée par l’Europe, singulièrement la France, et, il faut le dire, acceptés par la plupart des dirigeants africains contre quelques subventions ou prébendes.

Au moment ou ces lignes sont écrites, il est question de mercenaires « africains » (2) agissant avec violence pour le compte du colonel Kadhafi. Quelle est la réalité de cette rumeur ? S’agit-il d’une aide apportée par un autre dictateur voisin de la Libye ? (3) Se peut-il, dans cette hypothèse, que son action soit ignorée de ses puissants alliés européens et américains ?

Quoiqu’il en soit, dans ce climat et sur le sol d’un pays qui a connu des tensions discriminatoires à l’égard des sub-sahariens, quel sort est-il réservé aux immigrants retenus dans ces centres de la honte, point aveugle des événements en cours ? L’inquiétude grandit.

Il est plus que temps d’enquêter et d’alerter l’opinion européenne sur ce scandale humanitaire, au moment même ou elle commence à réaliser ce qui été fait en son nom, de l’autre côté de la méditerranée.

Il y a urgence.

NOTES
(1) http://www.la-croix.com/article/index.jsp?docId=2441808&rubId=25692
(2) Comprendre « Noirs »
(3) Idriss Déby, Tchad

* Amadou Amath

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