Solidarité avec le peuple malien : Le Mali, c’est un peu l’Afrique
‘’Celui qui accepte le mal sans lutter contre lui, coopère avec lui’’ - Martin Luther King
Il est important d’insister sur quelque chose de primordial, de préjudicielle, à l’heure actuelle. C'est l’unité de tous les Maliens, de quelque bord ils se situent, dans la phase difficile où se trouve le pays, afin de s’accorder sur l’essentiel. Au-delà, les démocrates africains, doivent se mobiliser et faire siennes les difficultés du pays frère, le Mali et considérer son combat, comme le nôtre.
Manifester notre solidarité au peuple malien, c’est comme faire du pléonasme, Car le Mali c’est le Sénégal, c’est également un peu l’Afrique parce qu’il est frontalier avec sept autres pays d’Afrique de l’Ouest que sont la Mauritanie, l’Algérie, le Niger, le Burkina Faso, la Cote d’Ivoire et le Sénégal. Sous ce rapport, pour paraphraser celui qui disait que ‘’les Américains sont les demi-frères du monde’’, nous pouvons dire que ‘’les Maliens sont les demi-frères de l’Afrique l’Ouest, pour ne pas dire de l’Afrique’’.
Le Mali c’est le pays de Soudjata Keita, du lettré d’Ahmet Baba, de Kanka Moussa, l’Empereur dont le voyage vers La Mecque pour un pèlerinage, fit chuter le cours de l’or dans toutes les contrées de son parcours. Tellement il en possédait. Selon M. Albakaye Ousmane Kounta (1), notre hôte, rares sont ceux qui sont informés que le Melli (Mali), a inspiré Rabelais l’auteur de Pantagruel.
Tout ceci pour mettre en évidence le rôle majeur que ce pays a joué et continue de jouer en Afrique, aux plans culturel, économique et social.
Donc seuls les bornés et autres pécheurs en eau trouble, peuvent ne pas souhaiter la paix pour Mali et à son peuple. D’ailleurs, il ne manque pas de Sénégalais qui le font, ouvertement et prient que les jihadistes d’AQMI et leurs ‘’alliés’’ (MNLA, MUJAO et Ansar Dine) arrivent dans nos murs pour y faire la loi. Dans une émission interactive d’une radio privée, un auditeur a formulé un tel souhait le 19 novembre courant, après avoir indiqué que ‘’quiconque ira combattre contre les rebelles, le fera contre l’islam’’.
Mais si certains ne partagent pas cette posture avec notre compatriote, il n’en demeure pas moins qu’ils pensent que ‘’l’enfer c’est pour les autres’’, que nous sommes loin de la zone des tempête. Erreur ! Les jihadistes sont à nos portes, avec leurs orgues de Staline face à la Mauritanie, le Sénégal, le Burkina, la Côte d’Ivoire. Et si le dilatoire continue. Qui nous dit que leurs canons ne feront pas mouche ? Et puis, les infiltrations et les kidnappings ne sont-ils toujours pas ça et là ?
Invité par notre ami, Albakaye Ousmane Kounta, du 9 au 17 novembre derniers, nous avons pu nous rapprocher et saisir les contradictions qui se font jour au niveau du pays, quoique la sérénité est de mise au sein des populations. Néanmoins, il est important d’insister sur quelque chose de primordial, de préjudicielle, à l’heure actuelle. C'est l’unité de tous les Maliens, de quelque bord ils se situent, dans la phase difficile où se trouve le pays, afin de s’accorder sur l’essentiel.
De ce point de vue, ceux qui soutiennent que l’heure n’est pas à la parlotte autour d’élections n’ont pas tort de le dire. Et cela toute la classe politique malienne devrait le comprendre et s’accorder dessus. Car il n’est même pas approprié d’organiser des élections des mois après la sortie de crise. Aussi, personne ne peut connaitre d’avance la tournure des événements et l’état du pays après. Sauf les partisans d’une ‘’élection à l’ivoirienne’’ qui a donné les résultats que l’on sait. Du reste, c’est comme qui dirait que les ‘’élections armées’’ , adossées à une ‘’rébellion armée’’, sont devenues des remèdes en vogue pour résorber les conflits dans notre continent.
Le Premier ministre Cheikh Modibo Diarra (beau-fils de Moussa Traoré), qui est soupçonné d’avoir un agenda caché, contribue à aiguiser les contradictions, en ce sens qu’il est soupçonné de se préparer à déposer sa candidature pour la présidentielle. Ceci en faisant fi ‘’des règles du jeu d’une transition neutre’’ consacré par ‘’la jurisprudence de la Transition de 1991-1992, où le Président du CTSP Amadou Toumani Touré et le Premier ministre Soumano Sako ont été frappés d’inéligibilité’’(Le Républicain su 09/11/2012).
Une autre contradiction et non des moindres, qui met en mal l’unité souhaitée, est notée là où aucune note discordante ne devait être repérée : l’Armée. Sous ce rapport, un signe qui sonne faux dans la grande muette est ‘’l’arrestation de forteresse de 60 jours à Kayes’’ du lieutenant-colonel Seydou Moussa Diallo, accusé d’avoir manqué à ses obligations de réserve, pour avoir adressé une lettre ouverte au président de la République et avoir fait des déclarations sur certaines radios de la place, à Bamako. La raison en est que le lieutenant-colonel avait formulé comme doléance : ‘’Aller au front pour en découdre avec les djihadistes et les bouter du pays’’. Pour se faire prendre au sérieux, il a entamé une grève de la faim pour voir aboutir sa revendication. D’aucuns pensent que le soldat Seydou Moussa Diallo, pouvait faire l’économie de ces sorties, car ‘’en sa qualité d’officier supérieur de l’armée, il ne devrait pas avoir de problèmes pour rencontrer le chef de l’Etat et lui remettre en main propre, sa lettre ouverte’’. (L’indépendant du 14/11/2012).
Tout cela est vrai. Mais, au regard du contexte délicat où se situe le pays, le président de la République, le ministre de la Défense ou le chef d’Etat major, ne pouvaient-ils pas convoquer le ‘’fautif’’ et lui ‘’remonter les bretelles’’, puis le laisser retourner auprès de ses troupes ? Il a été précisé qu’en faisant ‘’des déclarations dans la presse, Le lieutenant-colonel, ne faisait que saper le moral des troupes’’. Mais son arrêt de forteresse de 60 jours, pour ce qu’on pourrait qualifier d’excès ou ‘’abus de manifestation de patriotisme’’, ne pourrait-il pas, tout autant, saper le moral des troupes ? Les patriotes maliens devraient s’inspirer de l’histoire de la Chine qui nous renseigne que lors de l’invasion de ce pays par le Japon, en 1937, Tchang Kai-check, un pro capitaliste et Mao Tsé Toung, chef du Parti communiste chinois, ont signé la paix des braves, le temps de bouter dehors les envahisseurs, à travers ‘’Le Front uni.
L’unité des patriotes maliens est d’autant plus nécessaire que tout ce petit monde qui grouille et grenouille au niveau (la Cedeao, l’Ua, l’Onu) ne souhaite pas, dans l’absolue, la paix au Mali. Surtout les ‘’loubards-tueurs’’ qui fricotent et dialoguent avec les djihadistes. Un dialogue qui n’apporte aucun résultat probant, sinon faire gagner du temps et du terrain aux comploteurs de tout poil. Sous l’Apartheid, quelqu’un ne prônait-il pas le dialogue ? Actuellement, il est question quelque part, d’envisager de proroger ‘’ce dialogue’’. D’ici-là, va-t-on demander aux populations de Kidal de Gao et Tombouctou de rester sagement pendant qu’on leur coupe les mains, les flageller ?
Cela dit, beaucoup de patriotes africains ne s’expliquent pas l’attitude de l’Algérie, au moment où le complot contre le Mali s’affine et s’amplifie avec le blocage des armes dans les ports de Dakar, de Conakry et d’Abidjan. Cette Algérie (témoigne le cinéaste malien Alou Konaté), que l’ancien président de la République du Mali, feu Modibo Keita, a soutenu de toutes ses forces, vers les années 1960, période où l’actuel président Bouteflika était le responsable politique et militaire du Front Sud. L’aide de l’Algérie au Mali (dans le cadre d’un ‘’Front de salut’’ des deux pays) lui aurait permis, de régler le problème sans lui faire courir le risque de recevoir des barbouzes sur son territoire. Le moins que l’on puisse dire est que l’Algérie a rejoint le peloton des troupes qui ne jouent pas net dans cet imbroglio malien et africain. Toute chose qui semble annoncer un ‘’Berlin 1885’’ sur le Mali. En tout cas Modibo Keita, le gouverneur malien servant au nord du Mali vers les années 1960 et Frantz Fanon, doivent se retourner dans leurs tombes.
Cela dit, si nous nous arrêtons un peu sur les traitements des conflits, à géométrie variable, à la ‘’Nations Unies, à la Union Africaine et à la Cedeao’’ (Kenya, Cote d’Ivoire, Lybie, Syrie, Gaza), on se rend compte que ceux qui s’agitent actuellement pour le Mali, ne le font pas que pour la Paix. Aux peuples du Mali, du Sénégal et d’Afrique, d’en prendre conscience et faire échec à toute ‘’guerre par procuration’’. Mais tout en évitant de permettre à des Maliens d’asservir, tuer d’autres Maliens, afin (au nom d’un ‘’principe de précaution’’ ?), d’éviter que ceux-là ne se fassent tuer dans une guerre par procuration.
Donc, pour toutes ces raisons, nous pensons que les patriotes, les démocrates sénégalais et africains, doivent se mobiliser et faire siennes les difficultés du pays frère, le Mali et considérer son combat, comme le nôtre.
NOTE
(1) Albakaye Ousmane Kounta est né à Tombouctou en 1935, de père sonrai et de mère sénégalaise (Saint-Louis). Il a accumulée une riche expérience pour avoir été enseignant, économiste, membre de la Direction de l’Omvs à Dakar et conseiller dans divers département ministériels de son pays. Ecrivain-poète (voir bibliographie dans le Net), il a côtoyé le martiniquais Guy Tyrolien, Abdou Anta Ka, Senghor, Sékou Touré, Francis Bebey, ses compatriotes Mamadou El Bachir Gologo, Mahmane Tandirma et bon nombre de griots maliens.
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** Ababacar Fall-Barros est membre de Grila-Sénégal
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