CEDEAO : Le mauvais coup d’Etat et le bon coup d’Etat

Entre Ouagadougou et Abidjan tout a été bien orchestré. ATT s'est retrouvé réduit au silence et sans réaction devant sa destitution, les putschistes ont été contraints et forcés de rendre le pouvoir, tandis que la situation au nord était mise au second plan. Longtemps intéressée par la région de l’Azawad pour des raisons économiques et militaires, la France peut avoir le champ libre sur ce dossier.

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B B M

On n’aura tout vu, dans ce conglomérat de syndicat de chefs d’Etats africains, qu’est la CEDEAO. Au Mali, le chef de l’Etat ATT (Amadou Toumani Touré), a failli à sa mission de s’assumer comme tel et de jeunes militaires se sont substitués à lui, pris leurs responsabilités face à une rébellion armée au Nord du pays et la CEDEAO crie au scandale, parle de coup d’Etat et demande le ‘’retour à l’ordre constitutionnel’’. Toutes les énergies sont déployées pour ce faire, avec l’aide de l’ex-tombeur de Sankara, devenu chef d’Etat, pour annihiler leurs actions. Mais à y regarder de près, ce que la CEDEAO a fait en obtenant la démission d’ATT n’est pas loin d’un coup d’Etat. Plus soft, par ce que constitutionnel, mais coup d’Etat, tout de même.

Si on se réfère à la relation faite par le journaliste Jean Daniel, on sait qu’avec les coups de fil échangés entre les ‘’préfets’’ du Burkina et de la Cote d’Ivoire, d’une part, Et d’autre part entre ces derniers et ATT, on se rend compte qu’on a poussé celui-ci à ne rien dire ou à ne rien faire que de rendre sa démission. D’où des pressions exercées sur lui pour empêcher son retour au pouvoir. Si on n’assiste pas là à un coup d’Etat, ça lui ressemble en tous cas.

Etant donné les rapports de force, il y a eu simplement ce que nous pouvons appeler un ‘’bon coup d’Etat’’. Car Pour la CEDEAO, le capitaine Sanago, regardé comme un clone d’un ancien capitaine du Burkina nommé Thomas Sankara qui pense qu’‘’un militaire sans conscience politique, est un assassin en puissance’’, pourrait être un élément ‘’dangereux’’ qu’il convient de neutraliser rapidement. Maintenant, au fil du temps, on verra plus clairement pourquoi la Françafrique a misé sur le Sieur Diécounda Traoré.

II faut se rappeler qu’il est le complice d’ATT et qu’il aime le pouvoir. Ensuite, c’est le candidat de Paris et de Blaise Compaoré qui l’a parachuté de Ouaga à Bamako, avec ce procédé qui ressemble à une opération ‘’Barracuda’’. Car Paris travaille pour la partition du Mali à travers les hommes du MNLA, qui ont pignon sur rue à Paris où les médias leurs sont ouverts. Le bureau d’Alain Juppé, aussi. La directive c’est de discuter, faire du dilatoire. Pour aboutir à quoi ? Faire acceper le fait accompli, Cc’est à dire avoir des hommes qui acceptent que les multinationales françaises fassent main basse sur les fabuleuses richesses minières de la région ?

‘’Diviser pour régner’’ a été toujours le crédo du colonialiste d’hier et d’aujourd’hui. D’ailleurs, selon des personnalités réunies autour d’une structure dénommée Forum pour le Mali (Foram), parmi lesquelles ont on compte une vingtaine d’intellectuels ouest-africains dont la militante altermondialiste et ancienne ministre de la Culture du Mali Aminata Dramane Traoré, l’écrivain sénégalais Boubacar Boris Diop ou encore l’économiste nigérien Abdoulaye Niang, «la France espère obtenir de la future République laïque et démocratique de l’Azawad… la base de Tessalit hautement stratégique au plan économique et militaire ». (voir dans cette édition l’article « Mali : Chronique d’une recolonisation »)

En tout état de cause, tout se passe comme si nous sommes en train de revivre un remake de la situation de la Côte d’Ivoire, avec la rébellion de Guillaume Soro, déclenchée le 22 septembre, suivie de l’organisation d’une élection armée, elle-même suivie d’urnes bourrés, de fraude et du coup d’Etat de la France au bénéfice de l’actuel président de la CEDEAO ponctué par le kidnapping de Laurent Gbagbo et son acheminement vers La Haye. Alors, ces Messieurs qui nous parlent d’élections dans un pays occupé à moitié par des tueurs à gage armés, comment peut-on y organiser des élections sous les bombes et les balles sifflantes ?

Ceci dit, que cherche l’Algérie qui, dans tout ce mélimélo, fait le profil bas et parle de ‘’dialogue’’. Et dans quelle direction ? Attendons de voir, les jours à venir.

Nous terminons pour nous poser des questions sur l’attitude de quasi-indifférence, affichée par la classe politique sénégalaise, face à la situation qui prévaut au Mali. Une classe politique à qui il faut rappeler que le Mali, c’est le Sénégal et le Sénégal, c’est le Mali. Où sont donc ces partis sénégalais se réclamant d’une certaine gauche ? Pas une déclaration pour condamner les tueries ou pour exiger la préservation de l’intégrité territoriale de l’Etat malien, de leur part. En tout cas, le contexte électoral ne saurait constituer une excuse. Le souci de grappiller quelques postes pour entrer dans le nouveau gouvernement, oui.

Au Grila-Sénégal (Groupe de Recherche et d’Initiative pour la Libération de l’Afrique www.grila.org), nous manifestons notre solidarité au peuple malien, condamnons les exactions contre les paisibles populations du Nord-Mali et dénonçons tous les complots qui se trament contre l’indépendance et l’intégrité de ce pays frère.

CE TEXTE VOUS A ETE PROPOSE PAR PAMBAZUKA NEWS




* Ababacar Fall-Barros est coordonnateur du GRILA-Sénégal


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