Me faire disparaître en douceur : Lettre ouverte à Sandra M. Gilbert et Susan Gubar
Pius Adesanmi met en cause l'omission des érudits féministes africaines dans l'ouvrage "Norton Anthology"** et il lance un défi aux rédactrices en demandant "pourquoi un continent entier donne l'impression de n'avoir rien produit de la théorie sur le féminisme. "Je m'intéresse aux processus du conscient et du subconscient qui vous ont fait aboutir à la conclusion que l'Afrique, un continent entier de cinquante-quatre pays et de plus d'un milliard de gens, n'a donné rien, absolument rien, comme contribution aux cinq siècles de théories sur le féminisme. Après tout, en tant que chercheurs chevronnées aux Etats-Unis, vous connaissez toutes deux que les exclusions parlent plus fort que les inclusions.”
Chères Sandra et Susan, je vous salue toutes deux au nom du féminisme, de la libération de la femme, de l'égalité des genres, et, plus important, de la solidarité féminine mondiale. La publication de votre ouvrage très attendu sous le titre "Feminist Literary Theory and Criticism : A Norton Reader" (Théorie et critique littéraires féministes: Recueil Norton), constitue un événement tellement historique que je dois interrompre le sommeil merveilleux et bien mérité qui me fut finalement accordé lorsque les gens et le gouvernement de la France, qui agissent plus que jamais en pères et en mères quand il est question de prendre soin de la pauvre Afrique, ont de bonne grâce retourné mon cerveau et mon derrière au gouvernement sud-africain pour enterrement dans ma terre natale il y a quelques années.
Je rejoins la famille féministe américaine et mondiale pour vous féliciter toutes deux pour la publication de ce volume véritablement merveilleux. Il est évident que le travail intellectuel féministe ne sera plus jamais le même. Succès éclatant, dois-je dire, est devenu synonyme de la longue histoire de collaboration intellectuelle entre vous deux. Après tout, The Mad Woman in the Attic (La femme folle dans l'Atlantique), le premier cadeau de vos efforts de collaboration au profit de l'humanité, est restée la seule bible inévitable, incontournable de la recherche académique féministe depuis sa publication.
La référence à la magnanimité de la France en remettant mes restes au gouvernement et aux gens de l'Afrique du Sud aurait dû, à présent, faire ressortir mon identité. Cependant, il est toujours plus sûr et plus sage de jurer par l'invisibilité naturelle de l'Afrique et des Africains dans les dossiers d'importance mondiale. Et dans votre contexte immédiat aux Etats-Unis, il est absolument fou de supposer qu'il y ait une personne quelconque qui considère la connaissance de quoi que ce soit sur l'Afrique comme une nécessité. Sauf, évidemment, la famine, la mort par la faim, la pauvreté, les guerres, le Sida, la famine et la charité occidentale ou le "fait de donner" (excuses auprès du président Bill Clinton). Je dois dès lors supposer que vous ignorez totalement mon identité et me présenter. J'espère que vos cœurs pourront me pardonner ma présomption si vous connaissez déjà très bien mon histoire.
Je m'appelle Sarah Baartman, également bien connue à l'échelle internationale comme "la Hottentot Venus". Je vais vous épargner les détails insolents de mon histoire et me concentrer uniquement sur l'essentiel. Je suis tombée dans le piège et arrivée à Londres en 1810 où je devins aussitôt une prisonnière du voyeurisme rapace et capitaliste de l'Europe. Je suis sûre que je ne suis pas obligée de vous raconter l'histoire de l'Europe au 19e siècle et ses façons de traiter les Autres en Afrique et à d'autres endroits. Sans aucun doute, vous vous souvenez toujours de votre orientalisme- Edward a indiqué qu'il a été un très bon ami depuis mon arrivée ici. L'Europe de cette période était aussi un théâtre formidable de toutes sortes d'expositions. La zoophilie était en vogue. L'Autre de couleur devait être exposé publiquement et régulièrement à Londres, à Paris et à Lisbonne en tant que faune coloniale.
Comme le sort se débrouille toujours pour arranger ces choses, j'étais ce que les Européens appelaient – et continuent d'appeler- une "femme de tribu africaine" douée d'une partie arrière exceptionnelle. La science de l'Europe tira vite la conclusion que mon derrière avait souffert d'une déformation biologique connue sous le nom de stéatopygie.
Mes lèvres en tant que femme étaient aussi jugées trop immenses et allongées par rapport aux standards du monde civilisé déterminées par les lèvres de la femme blanche. Et ainsi, de la Bretagne en France, ma partie arrière et mes lèvres en tant que femme devinrent l'objet de consommation visuelle dans les sphères publiques du patriarcat du blanc. Moyennant le paiement de frais supplémentaires, les hommes blancs pouvaient même palper mon derrière pendant que j'étais en exposition.
Pour finir la mort m'emporta. Vous devez savoir que là d'où je viens en Afrique, la mort n'est pas une finalité. Je fis tout simplement la transition vers le statut d'ancêtre suivant la façon dont mes gens conçoivent le monde, d'où la révérence avec laquelle les Africains traitent les morts. Il n'en est pas tellement ainsi des Européens. Ils prirent leurs couteaux et objets de sculpture, sculpté et enlevé mon cerveau, les lèvres de ma féminité, et mon derrière, ils les ont mis dans des bouteilles, et ils les ont exposés au public au Musée de l'Homme à Paris. Oui, je peux vous voir embarrassées. Vous devriez. Toutes les féministes sensibles devraient. L'idée, juste l'idée ! La tragédie amère des parties les plus vitales d'une femme capturées par des hommes, arrachées par sculpture de son corps mort par des hommes, et stockées au Musée de l'Homme !
Mes parties sont restées sous la vue du public dans ce musée, preuve ultime de la victoire du patriarcat sur le féminisme, jusqu'en 1974, lorsqu'elles furent retirées et placées dans un sanctuaire privé. Finalement, en 2002, la France retourna sa précieuse conquête aux gens de l'Afrique du Sud.
Chères sœurs, la signification de mon histoire à la cause féministe et au travail intellectuel féministe dans le monde devrait être dès lors assez évidente. Pendant presque deux siècles, j'étais une célébrité internationale de la cause féministe, l'incarnation même du contrôle patriarcal de la sexualité féminine africaine, la sexualité féminine noire, et, j'ose le dire, la sexualité féminine. Permettez-moi d'être claire : l'histoire de mon corps dans l'économie internationale des significations est l'histoire de vos propres corps, l'histoire du corps de toute femme. La différence réside dans le détail ou dans ce que vos collègues post-modernistes appelleraient particularités locales.
(…) Il est logique que toute personne raisonnable s'attendrait à ce que je fasse une entrée grandiose, mémorable dans votre volume Norton à travers le travail de l'une ou l'autre des nombreuses femmes africaines, érudits de renom international, qui ont écrit à mon sujet. Sous peine de manquer de modestie, personne ne songerait à retenir une sommation de cinq siècles de travail intellectuel féministe – que votre anthologie Norton représente - et faire chou blanc en ce qui concerne l'histoire de Sarah Baartman. Après tout, j'ai été théorisée, post-colonisée, et post-modernisée dans toutes les versions compliquées du féminisme. Je ne pensais pas qu'il m'était possible d'être réduite au silence dans un décompte historiographique quelconque qui se veut sérieuse en matière de théorie féministe.
Croyez-moi, mes chères sœurs, je n'ai pas été poussée à vous écrire par une quelconque auto-indulgence narcissiste. Vous conviendrez, à partir de ce que vous savez de mon histoire, que je suis presque habituée à être réduite au silence, à aller aux oubliettes. Je suis en réalité plus préoccupée par les implications idéologiques plus vastes, plus profondes du fait que vous m'ayez fait disparaître doucement de votre volume Norton. Je suis intéressée par les histoires racontées – ou non racontées – par vos choix et options sur le plan de la rédaction, l'instinct d'inclure et l'impulsion d'exclure. Je m'intéresse aux processus conscients et subconscients qui vous ont fait aboutir à la conclusion que l'Afrique, un continent entier de cinquante-quatre pays et plus d'un milliard de gens, n'a donné rien, absolument rien, comme contribution à cinq siècles d'élaboration de théories féministes. Après tout, en tant que chercheurs chevronnées aux Etats-Unis, vous connaissez toutes deux que les exclusions parlent beaucoup plus fort que les inclusions. Je sais que nous sommes à la même page ici.
Certaines gens pourraient vous faire des éloges pour avoir confectionné ce volume réellement mondial et représentatif en incluant les voix d'horizons diversifiées de l'Autre. Ils auraient raison de faire cela. Après tout, vous avez inclus un si grand nombre de dissertations, par Hortense Spillers, Alice Walker, Toni Morrison et Audre Lorde, preuve de votre connaissance des voix et pratiques féministes africaines ; vous avez inclus des dissertations par Gayatri Spivak et Chandra Mohanty, preuve que vous connaissez le domaine en expansion du Tiers Monde/voix et pratiques féministes post-coloniales/transnationales ; l'entrée par Paula Gunn Allen a fait éviter la honte pour les féminismes des natives de l'Amérique ; Gloria Anzaldua – une autre bonne amie à moi ici – en toute reconnaissance, garantit la présence des féminismes "chicana" dans votre volume. De nature, la présence de ces Autres voix, qui sont introduites de manière stratégique dans le texte, est une preuve louable de ce que vous avez fait attention lorsque Hazel Carby s'est écrié dans un article: "Femmes blanches Ecoutez" ! Vous avez écouté.
Vous avez convenu avec elle que le féminisme pourrait et ne devrait plus être l'évangile de la femme blanche de l'Occident selon Betty Friedan, Germaine Greer, Gloria Steinem, Kate Millett, Judith Butler, Diana Fuss, Elaine Showalter et les autres trop nombreuses pour être mentionnées. Vous avez convenu avec Carby que les récits de la délégation française – Simone de Beauvoir, Luce Irigaray, Hélène Cixous, Monique Wittig, et Julia Kristeva – ne devraient plus être considérés comme universels. Vous avez convenu que les femmes chinoises sont probablement mieux placées pour parler à propos d'elles-mêmes et pour elles-mêmes que d'être représentées par le titre de Julia Kristeva "About Chinese Women" (A propos des femmes chinoises").
C'est votre connaissance de ces choses qui rend encore plus alarmante votre exclusion des théories et des théoriciennes féministes africaines de votre volume. Serait-ce parce que vous imaginiez que les voix des femmes africaines que vous avez sélectionnées parlent adéquatement pour leurs sœurs du même continent ? C'est possible. Si tel est le cas, je dois vous dire que les femmes africaines américaines ne peuvent pas être interposées et parler au nom des femmes africaines du continent. Selon un proverbe africain, le singe et le gorille pourraient prétendre être les mêmes, mais le singe reste le singe et le gorille le gorille.
Peut-être que vous imaginiez que les femmes africaines seraient mieux servies si elles trouvaient de l'espace dans le Troisième parapluie féministe mondial/postcolonial/transnational que vous avez représenté avec les voix de Gayatri Spivak et Chandra Mohanty ? C'est possible. Pourrait-ce être que vous ne connaissez tout simplement pas le corps considérable de l'intellection féministe africaine, juste là derrière vous à l'académie américaine ? C'est possible. Pourrait-ce être que vous avez juste choisi de tout simplement les faire disparaître comme vous m'avez faite disparaître ? C'est possible.
Je suis sûre que vous savez que ce n'est que maintenant en 2007 que Bill O'Reilly, le fameux fondamentaliste de droite, qui est bavard dans Fox News, vient de découvrir que les Africains Américains sont capables de manger convenablement avec la fourchette et le couteau, comme des gens réels, comme des gens normaux. Maintenant, je ne veux pas que vous preniez le même chemin. Je ne voudrais pas que vous découvriez, en 2007, que les femmes africaines continentales ont développé, et continuent de développer, des théories féministes pendant très longtemps dans l'académie américaine et qu'elles ont produit un corps considérable de travail, dont un ou plusieurs devraient avoir mérité de passer par l'aiguille de Norton.
Puisque vous avez inclus le travail par Alice Walker, je considère que vous connaissez toutes deux comment sa théorie de "womanism" (militantisme féministe) a si bien circulé aux Etats-Unis et à travers les programmes et départements d'études féministes mondiales. Le problème c'est que, en 1985, avant que Walker n'utilisa le terme, Chikwenye Okonjo Ogunyemi, érudit féministe nigériane basée aux Etats-Unis, avait publié une dissertation en Signes sous le titre: "Womanism: The Dynamics of the Contemporary Black Female Novel in English". Maintenant, «Signs» n'est pas une nouvelle que vous deux pourriez avoir ratée. C'est le journal d'études féministes analysé par les pairs le plus prestigieux aux Etats-Unis. Mais supposons que, d'une certaine manière, vous l'avez manqué, Ogunyemi a par la suite publié un livre très important sous le titre "African Wo/Man Palava", avec l'imprimerie de l’Université de Chicago, en 1996.
Avez-vous également manqué cela ? Nous parlons de la Presse de l’Université de Chicago, pour l'amour de Dieu ! Il y a aussi Obioma Nnaemeka, une formidable théoricienne du féminisme basée à Indiana University. Elle est de réputation mondiale. Certainement. Franchement parlant, sa dissertation titrée "Feminism, Rebellious Women, and Cultural Boundaries" (Le féminisme, la femme rebelle et les barrières culturelles) ne se préoccupe en rien de ne pas faire partie de votre Manuel Norton. Il y a bien sûr son formidable travail sur la circoncision féminine en Afrique. A propos, n'est-ce pas que la circoncision féminine en Afrique – mutilation génitale en langage occidental – est supposée constituer un sujet de prédilection sensationnelle pour les féministes et ONG occidentales ? Si ce n'est pas le cas, un seul extrait du volume édité d'Obioma Nnaemeka, sous le titre "Female Circumcision and the Politics of Knowledge: African Women in Imperialist Discourses," (La circoncision déminine et la politique du savoir: la femme africaine dans les discours Impérialistes) a réussi à entrer dans votre volume, ne pensez-vous pas qu'il y a quelque chose qui cloche terriblement ?
Il y a également Oyeronke Oyewumi, une importante théoricienne féministe basée aux Etats-Unis. Minnesota Press a publié son livre titré "The Invention of Women : Making an African Sense of Western Gender Discourses" (L'Invention de la femme : Donner un sens africain aux discours occidentaux en genre), et ce avec des acclamations critiques en 1997. Cela ne mérite-t-il aucun chapitre dans ce livre ? Il y a également Ifi Amadiume. Elle enseigne à Dartmouth. Son ouvrage "Male Daughters, Female Husbands: Gender in an African Society" (Filles mâles, maris femelles : Le genre dans la société africaine) est un titre classique d'une valeur inestimable. Avez-vous aussi raté cela ?
Il y a Molara Ogundipe et Nkiru Nzegwu. Qu'en est-il de l'Egyptienne Nawal El Saadawi et de l'Algérienne Assia Djebar ? Ces deux figures mondiales d'écriture féminine et de travail intellectuel féministe n'ont écrit rien qui aurait pu secourir le continent entier ? Vous remarquerez que je me suis gardée de mentionner qui que ce soit parmi les nombreuses penseuses féministes importantes basées en Afrique. Je ne veux pas vous ennuyer. C'est aussi mieux de citer celles dont on croirait que vous ne sauriez, en toute raison, avoir manqué l'altérité suivant le langage académique américain.
J'ai lu avec peine dans votre préface que "nos conversations au sujet de la construction du présent livre ont été améliorées par beaucoup de collègues et amis qui ont échangé avec nous des syllabus, ont mené des débats sur leurs pratiques pédagogiques et fait des suggestions concernant ce qui pouvait être inclus". Une longue liste de noms suit et c'est ici que réside la tristesse : que mon histoire et l'histoire de la contribution de l'Afrique à la théorie féministe ne soient apparues à aucun moment dans ces conversations avec la longue liste de consultantes. Pas une seule personne, pas une seule collègue à travers le paysage d'études féministes aux Etats-Unis n'a relevé cet oubli grave – s'il s'agit effectivement d'un oubli – de votre part ? Obioma Nnaemeka est une voisine de Susan Gubar à Indiana, pour l'amour du Christ !
Il y a toutefois quelques bonnes nouvelles. On ne manquera pas d'intellectuels africains contents qui se soucieront d'avoir la sagesse de s'attendre même à ce que l'Afrique n'ait pas été incluse dans votre travail pour commencer. Pourquoi gémissons-nous et nous plaignons-nous toujours quand les Occidentaux nous ignorent, diront-elles ? Notre inclusion ne rentre pas dans leurs responsabilités. Nous devrions nous inclure nous-mêmes en créant nos propres structures, point trait ! Après tout, Oyeronke Oyewumi, comme par anticipation de ce qui se passerait avec votre projet Norton, avait édité le titre "Gender Studies: A Reader" en 2005. De telles opinions ignoreraient bien entendu le simple fait que votre travail a une base universalisante au regard de son étendue historique et de son champ thématique et l'Afrique a été exclue de cette image. Elles ignoreraient le fait que ceci c'est Norton et qui dit Norton dit canons ! Elles ignoreraient le fait que, même si nous devions adopter l'approche réductionniste, tout ce que vous avez fait ici c'est de refléter les multiples voix qui ont modulé les études féministes, le genre et la femme dans l'académie américaine au fil des années, et que le produit fini exprime le message fallacieux comme quoi aucune femme africaine n'a fait partie de ce processus.
Je sais que vous vous demandez comment une femme africaine, qui est décédée il y a tant d'années sans aucune preuve qu'elle a fréquenté une quelconque université, parvient à être si habituée au langage et à la procédure académiques. Vous devriez connaître la réponse à ça: je suis maintenant un ancêtre, un esprit. Je ne suis pas humaine. Je suis supposée tout savoir. C'est ce qui sanctionne mon intervention dans les affaires de vous autres les mortels!
Paix et Amour
Sarah Baartman
**Feminist Literary Theory and Criticism: A Norton Reader (Paperback - Théorie et critique littéraire féministes: Manuel Norton - Livre de poche]
Par Sandra M. Gilbert (Auteur), Susan Gubar (Rédacteur en chef)
* Pius Adesanmi est Professeur Associé d'Anglais et directeur du Projet sur les Nouvelles littératures africaines (www.projectponal.com) à Carleton University, Ottawa, Canada. Outre son œuvre académique, le Dr. Adesanmi publie régulièrement des articles d'opinion dans divers forums internet. Il gère un blog régulier pour "The Zeleza Post" ( et il a contribué à Counterpunch, Slepton et Chimurenga en ligne. Tél: (613)520 2600, ext. 1175 Visitez-nous aujourd'hui sur : www.projectponal.com
* Veuillez envoyer vos commentaires à [email protected] ou commentez en ligne sur www.pambazuka.org